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Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 2.djvu/169

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ils étaient d’émigrer pour sauver leurs âmes, et parla si bien que le départ fut décidé sur-le-champ, et exécuté peu de mois après. Il sauva ainsi toute sa famille qui, sans cela, n’eût jamais pratiqué franchement le christianisme. À peine étaient-ils arrivés à la capitale, qu’ils furent exposés à de graves vexations de la part des païens, et perdirent presque toute leur fortune. Quelques-uns de leurs amis, très-riches et très-puissants, s’offrirent à les mettre pour toujours à l’abri de ces persécutions, en en punissant les auteurs. Mais François et ses frères, pour obéir à l’ordre de Jésus-Christ et imiter son exemple, refusèrent de rendre ainsi le mal pour le mal, et ils préférèrent se retirer dans les montagnes. Là, appliqué à tous ses devoirs, François instruisait ses enfants, lisait constamment les livres de religion, et quoique bien pauvre lui-même, trouvait encore moyen de faire l’aumône à ceux qui étaient dans le besoin. Tous l’aimaient et l’estimaient. On écoutait avec joie ses exhortations, et plusieurs venaient de très-loin pour l’entendre.

Douze ans plus tard, son fils le P. Thomas T’soi, écrivant à M. Legrégeois, directeur du séminaire des Missions étrangères, donnait sur François les détails suivants :

« Quoiqu’il n’eût reçu que bien peu d’instruction, mon père puisait dans de fréquentes méditations, dans de pieuses lectures, une charité ardente, et une connaissance admirable de nos mystères. Dans le travail comme dans le repos, à la maison comme à la campagne et en voyage, partout et toujours uni à son Dieu, il ne s’entretenait que de religion et de piété. Ses paroles étaient si fortes, si simples, si persuasives, qu’elles pénétraient tous les cœurs d’amour pour Dieu, et d’admiration pour son serviteur. Son zèle pour la gloire du divin Maître s’alliait à une tendre charité pour le prochain. Lorsqu’il allait au marché, il achetait ce qu’il y avait de plus vil et de plus mauvais, et à ceux qui l’en blâmaient il faisait cette réponse : « Comment pourraient vivre ces pauvres gens, s’ils ne trouvaient pas d’acheteurs pour les denrées de rebut ? » Cette charité grandissait et devenait héroïque dans les temps de calamités. Les moissons furent, une année, détruites par les eaux. Les gémissements et le désespoir étaient universels comme la misère. François seul, au grand étonnement des fidèles eux-mêmes, montrait un visage aussi serein que de coutume. « Pourquoi, disait-il, s’abandonner ainsi à l’affliction ? Est-ce que tous les événements ne viennent pas de Dieu ? Si vous croyez à sa paternelle providence, pourquoi donc attrister vos cœurs ? » Dans la famine, il se multipliait et pourvoyait à tous les besoins