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Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 2.djvu/532

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intentions… Oui, il y a une anguille sous roche, mais elle ne se hâte pas de sortir. Je m’attendais à une entrevue avec le régent, immédiatement après mon retour, puisqu’on me priait de revenir en toute hâte ; jusqu’à présent il n’y a rien encore. Je pense qu’elle aura lieu. Mais, dans tous les cas, nous avons fait un pas immense vers la liberté. Prions le Seigneur et notre bonne Mère de m’assister en ces graves circonstances. Recommandons aussi aux chrétiens d’être très-circonspects. »

Hélas ! à ce moment-là même, sa mort, celle de tous ses confrères, et la suppression définitive du christianisme en Corée, venaient d’être résolues. La cour, comme nous l’avons fait remarquer, était presque toute composée d’ennemis acharnés de l’Évangile. Plusieurs fois déjà, ils avaient inutilement demandé qu’on publiât de nouveau les édits de persécution. Ils attendaient une occasion favorable, et ils ne la laissèrent point échapper. Il n’était plus question des Russes ; leur navire s’était, dit-on, retiré, leurs troupes avaient repassé la frontière, et la frayeur qu’ils avaient inspirée d’abord avait à peu près disparu. D’un autre côté, l’ambassade coréenne, partie pour Péking en décembre 1865, venait d’envoyer une lettre où il était dit que les Chinois mettaient à mort les Européens répandus dans l’empire. Cette lettre arriva à Séoul dans les derniers jours de janvier ; elle fut comme l’huile jetée sur le feu. Les quatre principaux ministres se mirent à désapprouver hautement la démarche du régent vis-à-vis des évêques. « Haine aux Européens ! » s’écriaient-ils ; « pas d’alliance avec eux, ou c’en est fait du royaume ! À mort tous les barbares d’Occident ! à mort tous les chrétiens ! » Le régent rappela l’expédition franco-anglaise en Chine, le danger auquel on s’exposait, l’invasion possible de la Corée, etc… « Non, » lui répondit-on, « vaines frayeurs que tout cela ! N’avons-nous pas déjà tué plusieurs de ces Européens ? Qui a jamais cherché à venger leur mort ? Quel dommage en avons-nous éprouvé ? » Ils faisaient allusion à Mgr Imbert, MM. Maubant et Chastan, martyrisés en 1839, peut-être aussi aux naufragés qui, à diverses époques, avaient été impitoyablement massacrés sur les côtes. Le régent, seul de son avis, se laissa-t-il convaincre par leurs raisons et entraîner par leur fanatisme ? ou bien fut-il forcé de céder au torrent, pour ne pas risquer sa propre autorité et compromettre sa position ? On ne le saura que plus tard, quand les missionnaires seront rentrés en Corée, et auront pu prendre des renseignements plus complets sur tout ce qui se passa à cette époque. Quoi qu’il en soit, il céda, et signa l’arrêt de mort de