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point envoyer de courrier dans le Léao-tong sans avoir reçu une lettre de sa part. »

« Pendant que j’étais au Chang-si, un catéchiste qui a été longtemps au service de Mgr le vicaire apostolique de cette province, me promit d’aller, quand je voudrais, louer une maison sur les frontières de la Corée. Quand je fus assuré de la bonne volonté des Coréens, je crus devoir accepter cette offre. Sans ce moyen, il me paraissait trop dangereux de passer quelque temps aux frontières, logé chez des païens.

« Le 30 mars, j’envoyai donc un courrier au Chang-si pour avertir ce catéchiste et l’amener avec lui.

« Pendant la nuit du 2 au 3 avril, quelques séditieux d’un district du Chang-si, peu éloigné du domicile de Mgr le vicaire apostolique, égorgèrent le mandarin du chef-lieu, sa famille, ses domestiques, sa garde, et après ce massacre ils mirent le feu à la maison ; deux individus seulement purent se sauver pendant l’obscurité. Bien des personnes sont persuadées que les meurtriers sont de malheureux Chinois poussés à bout par les exactions exorbitantes de leur mandarin. Les confrères de celui-ci, dont la conduite n’était pas meilleure, craignirent d’être recherchés ; ils firent courir le bruit que c’était une conspiration tramée par les Pe-lien-kiao, ou sectateurs du nénuphar blanc, société secrète dont le but est de renverser le gouvernement et la dynastie tartare. Le premier mandarin militaire du district fit aussitôt cerner la ville, plaça des corps de garde dans toutes les avenues, se saisit de tous les gens suspects, et, comme c’est l’ordinaire, fit arrêter tous les chrétiens qu’il put trouver. On sait qu’il n’y a parmi eux aucun Pe-lien-kiao, que leur religion les oblige à rester fidèles à leurs princes et aux magistrats ; mais n’importe, le christianisme est une religion prohibée par le gouvernement, il faut la persécuter : il n’arrive point de funeste événement dont les chrétiens n’aient à souffrir. Parmi les chrétiens que ce chef militaire fit arrêter, se trouva un prêtre chinois. Ce malheureux accident mit le Chang-si et les districts voisins en rumeur : le gouverneur général publia un édit foudroyant contre les Pe-lien-kiao et contre toutes les sectes prohibées, parmi lesquelles il comprenait la religion chrétienne, qu’il nommait expressément. Par une contradiction inexplicable, il défendait d’inquiéter les bonzes, de quelque secte qu’ils fussent, quoiqu’on en eût arrêté quelques-uns, comme convaincus d’être Pe-lien-kiao. Tout semblait présager une persécution générale dans le Chang-si. À Ta-juen-fou, métropole de la province, on avait commencé à procéder contre les