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toire coréenne prouve que, dans ces années de panique, il se trouve toujours des aventuriers qui, exploitant l’effroi général, en profitent pour piller, pour faire des levées en masse, mettre tout à feu et à sang, et même parfois s’emparer du trône. On n’en viendra peut-être pas jusque-là, mais très-probablement cette année nous aurons beaucoup à souffrir, ne fût-ce que des voleurs, qui déjà s’organisent en bandes pour le pillage, et au besoin pour l’assassinat.

« Nos chrétiens et nous, sachant qu’il ne peut guère arriver quelque chose de pire, nous nous tenons tranquilles, appuyés que nous sommes sur la volonté divine, et convaincus qu’elle fera tourner les événements à sa plus grande gloire et à notre bien spirituel. »

Quelques semaines plus tard, en novembre, Mgr Daveluy écrivait à son tour :

« Notre année se résume ainsi : misères sur misères, mais partout grande protection de Dieu, et, au milieu des tribulations, avancement de l’œuvre apostolique.

« Dès avant le départ de nos dernières lettres, un chrétien âgé de soixante-treize ans avait été saisi et emprisonné, sur l’ordre d’un grand inquisiteur envoyé par le roi, avec des pouvoirs illimités, pour visiter secrètement les provinces. Le néophyte fut enfermé dans une ville, à deux lieues de ma résidence. Bien qu’il fût arrêté pour cause de religion, il y avait aussi probablement quelque autre motif étranger à la foi. Quoi qu’il en soit, il avait été assez bien traité, quand le juge, auquel avait été confié son procès, sembla vouloir soulever une affaire plus grave. Il interrogea l’accusé sur notre présence dans le royaume, sur nos allées et venues dans son village, sur d’autres détails fort peu rassurants pour nous, et ajouta quelques tortures à ses questions. Le bon vieux répondit assez adroitement, sut décliner les réponses directes, et, sans avoir eu le courage de confesser hautement sa foi, put éviter une apostasie formelle. L’inquisiteur, qui n’était pas mal disposé, ne se montra pas difficile et le chrétien fut relâché sans bruit, après environ deux mois de captivité.

« À cette même époque, un païen ennemi de la religion, et qui en connaît assez bien tous les secrets parce que plusieurs de ses parents la pratiquent, voulut soulever une persécution générale. Il dressa donc une liste de cent chrétiens choisis entre les plus notables, et la fit présenter au grand inquisiteur. Quand ce chef de la police la reçut, il était en compagnie d’un autre mandarin très-haut placé. Celui-ci, en ayant pris lecture, dit : « Voilà