Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/102

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nent, à un bourgeois orgueilleux & ſot qui a l’impudence de ſe méconnoître au point d’oublier qu’il a une femme pour devenir le galant ſecret d’une Marquiſe, qui ſe ſert de tous les moyens qu’il peut imaginer pour la ſéduire, c’eſt de vous qu’on peut dire, dat veniam corvis.

Vous faites des queſtions au Public mais vous lui dictez ſes réponſes ; elles ſont trop ſubtiles, on n’y reconnoît pas ſon ton. Je vais m’emparer à mon tour du Tribunal, interroger le Public, & le laiſſer répondre avec toute la naïveté qui lui eſt propre. Public ; répondez moi, queſt-ce que M. Jourdain ? » C’eſt un ſot. Que fait ce ſot ? À cinquante ans il apprend à lire, il apprend la Philoſophie, il apprend à tirer des Armes, il apprend à chanter, il s’habille comme les grands Seigneurs à ce qu’il croit, il a la ſotte vanité de penſer de lui, qu’il eſt un habile homme en tout dès la premiere leçon, au point de vouloir déjà montrer aux autres, & cela me fait bien rire. »

Vous avez raiſon de rire, tout cela eſt en effet très ridicule, mais ſi l’on n’a pas de plus grands reproches à faire à M. Jourdain, M. Jean Jaques a raiſon de s’emporter contre Moliére & de dire qu’il eſt le perturbateur de la ſociété ; qu’il excite les ames perfides à punir ſous le nom de ſottiſe, la candeur des honnêtes gens. Je crois comme eux que parce qu’un