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L. H. DANCOURT

Où les Bourgeois d’ailleurs prendroient ils le droit de mépriſer les Comédiens ? Ceux d’entr’eux qui ont un peu de ſens commun, s’en tiendront à dire, c’eſt qu’ils ſont excommuniés. Ils ſe garderont bien de les attaquer du coté des mœurs & de la probité. En effet un Procureur, un Marchand, un Commis ſavent bien que s’ils reprochoient aux Comédiens leurs mauvaiſes mœurs, ceux-ci ſeroient autoriſés à leur reprocher leur mauvaiſe foi. Ils aiment donc mieux s’appuier d’un titre reſpecté mais injuſte, que d’un titre mieux fondé mais qu’on peut faire valloir réciproquement contre eux.

Les maneuvres de la Chicane, les friponerie, de la Finance, les fourberies du Commerce, la rapacité des uns, les banqueroutes des autres, le libertinage clandeſtein de tous, ſont ſans doute auſſi condamnables que l’inconduite d’une partie des gens de ſpectacle.

Il ſemble que ce ſoit un reproche que vous vouliez faire aux Comédiens que d’être admis à la table des Grands & que cette faveur vous faſſe conclure qu’il faut que les hôtes & les convives ſoient également corrompus pour ſe trouver enſemble : il y a pourtant une diſtinction bien eſſentielle à faire. Ceux qui invitent à leur table une chanteuſe des Chœurs, ou une figurante des ballets de l’Opéra, ou toute autre femme de Théatre qui n’a pas des talens diſtingués, n’invitent que rarement les hommes à ce repas ; ils y ſeroient de trop, eu égard à l’objet de la partie, &