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L. H. DANCOURT

feſſions les plus honnorifiques ceſſent d’être honnorables pour ceux que leur incapacité & leur métalent en rendent indignes. Encourager le talent par des honneurs, c’eſt honnorer, c’eſt autoriſer ſans doute la profeſſion dans la quelle ce talent eſt néceſſaire ; donner le bâton de maréchal à de braves Lieutenants Généraux, les combler d’honneurs & de biens, c’eſt encourager les jeunes Officiers, c’eſt honnorer leur profeſſion en recompenſant ceux qui l’exercent avec diſtinction.

Si nous avions aujourd’hui des Cicéron qui plaidaſſent pour nos Roscius, on les entendroit ſans doute s’élever contre le préjugé qui avilit la profeſſion de ceux-ci, & s’efforcer de rendre les honneurs à des talens qu’on attaque aux dépens de la raiſon & de la Vertu.

Prenez y garde M. ce n’eſt pas lorsque les Jeux Sceniques furent inſtitués qu’ils furent avilis, ils étoient des actes de Religion, dont les Acteurs étoient les Miniſtres : on les conſidéroit donc, comme des gens conſacrés au ſervice des Dieux ; ce n’étoit pas alors que le Préteur diſoit : Quisquis in ſcenam prodierit infamis eſt.

Ce fut lorsque ces ſpectacles ſacrés devinrent profanes & impudiques, qu’ils furent abandonnés aux talens des esclaves & de gens déjà mépriſés avant de monter ſur la ſcene ; ce fut pour empêcher les honnêtes gens d’exercer une profeſſion licentieuſe, de ſe confondre avec des hommes vils, pour inſulter par des ſatires odieuſes & perſonnelles les meilleurs ci-