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Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/74

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CHAPITRE II.

De la Tragédie.




Le Théatre rend la Vertu aimable, c’eſt ce que les Auteurs Dramatiques & bien des ſages penſent unanimement : mais cet avantage ne vous étonne point, ce n’eſt pas ſelon vous opérer un grand prodige, la nature & la raiſon l’operent avant la ſcene ; diſtinguons, s’il vous plait. Si tous les hommes étoient ſages naturellement rien de plus inutile, j’en conviens, que le Théatre ; rien de plus inutile que tous les écrits des Peres, que l’Évangile même : mais ſi la plûpart des hommes ne ſont rien moins que ſages, & que leur conduite & leurs mœurs prouvent que la nature & la raiſon ne leur ont pas encore fait trouver la Vertu aſſés aimable, pour n’avoir pas beſoin de peintres qui leur en fasſent remarquer les attraits : ſi la vûe de ces peintures les porte à faire plus d’attention à l’original, comme le portrait d’une jolie femme fait déſirer d’en connoître le modele à ceux qui ne l’ont pas vuë ; il eſt donc probable que le Théatre peut opérer les mêmes effets & que le coloris agréable qu’il prête aux charmes de la Vertu altérées quelque fois par les pinceaux auſteres des Paſteurs ou des Philoſophes, peut faire déſirer de la connoître & de la pratiquer. Or on voit ſouvent au Théatre combien la Vertu paroit aimable à