Page:Dante - La Divine Comédie, traduction Lamennais volume 1, Didier, 1863.djvu/233

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
221
CHANT PREMIER.

14. Mut primitivement ces beaux astres ; de sorte qu’à bien espérer me conviaient le gai pelage de cette bête fauve 8,

15. L’heure du jour et la douce saison : non toutefois que ne m’effrayât la vue d’un lion 9 qui m’apparut.

16. Il paraissait venir contre moi, la tête haute, avec une telle rage de faim que l’air même semblait en effroi.

17. Et une louve 10 qui, dans sa maigreur, semblait porter en soi toutes les avidités, et qui bien des gens a déjà fait vivre misérables.

18. Elle me jeta en tant d’abattement, par la frayeur qu’inspirait sa vue, que je perdis l’espérance d’atteindre le sommet.

19. Tel que celui qui désire gagner, lorsque le temps amène sa perte, pleure et s’attriste en tous ses pensers ;

20. Tel me fit la bête sans paix 11, qui, peu à peu s’approchant de moi, me repoussait là où le soleil se tait 12.

21. Pendant qu’en bas je m’affaissais, à mes yeux s’offrit qui 13 par un long silence paraissait enroué.

22. Lorsque, dans le grand désert, je vis celui-ci : — Aie pitié de moi, lui criai-je, qui que tu sois, ou ombre d’homme, ou homme véritable.