Page:Dante - La Divine Comédie, traduction Lamennais volume 1, Didier, 1863.djvu/481

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
471
CHANT TRENTE-TROISIÈME.

31. Passant outre, nous vînmes en un lieu où durement la glace en enveloppe d’autres, étendus, non le visage en bas, mais à la renverse.

32. Là les pleurs mêmes empêchent de pleurer ; sur les yeux trouvant un obstacle, ils rentrent en dedans pour accroître l’angoisse,

33. Parce que les premières larmes se congèlent, et comme des visières de cristal, au-dessous des cils, remplissent toute la coupe.

34. Quoique le froid eût, comme un cal, privé mon visage de tout sentiment,

35. Il me semblait sentir un peu de vent ; sur quoi je dis : — Maître, qu’est-ce qui le produit ? Ce lieu n’est-il pas vide de toute vapeur ?

36. Et lui à moi : « Tu seras bientôt là où, voyant la cause de ce souffle, l’œil à ta question répondra. »

37. Lors un des malheureux qu’enveloppe la froide croûte nous cria : « O âmes si cruelles que la demeure la plus basse vous est assignée,

38. « Otez-moi du visage les durs voiles, que je puisse un peu exhaler la douleur dont mon cœur est plein, avant que les pleurs regèlent. »

39. Et moi à lui : — Si tu veux que je te soulage, dis-moi qui tu es ; et si je ne te dégage, que j’aille au fond de la glace !