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INTRODUCTION.

mêmes précautions ; aussi verrons-nous plus loin que Dante lui-même fournit des explications très-utiles pour l’intelligence non-seulement de ses premières poésies, mais encore de la Divina Commedia, sans néanmoins dissiper, à beaucoup près, toutes les obscurités.

Pour ne pas interrompre l’enchaînement des idées et des faits qui relient entre eux ses autres ouvrages et en forment le meilleur et le plus sûr commentaire, nous parlerons ici de son Traité de la langue vulgaire[1] qu’il contribua tant à fixer au degré où elle pouvait l’être, si près encore de son origine. Ce sujet, en apparence purement littéraire et scientifique, n’était pas étranger aux intérêts de parti. Les Guelfes et les Gibelins avaient chacun leur langue : les Guelfes le latin, langue officielle connue de la seule classe instruite, les Gibelins la langue parlée et entendue de tous. Ce n’était pas là, certes, une différence légère, car elle marquait deux tendances contraires, l’une vers l’avenir, l’autre vers le passé. La naissance de la langue vulgaire fut la naissance de l’esprit nouveau. Quand les peuples eurent leur langue, ils eurent leur pensée spontanée, vivante.

Dante, selon la méthode du temps, remonte à l’origine du langage même, qu’il place en Dieu parlant au premier homme, et l’homme dut, selon lui, parler avant la femme en vertu de sa prééminence. Cette lan-

  1. De vulgari eloquio.