Page:Dante Alighieri - La Vie nouvelle, traduction Durand Fardel.djvu/215

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Il faut remarquer avec quelle délicatesse le Poète fait allusion au désir, au désir sensuel, qu’il appelle appétit, n’ayant employé qu’une fois le mot désir.

Cette canzone et les explications du Poète ne peuvent laisser aucun doute touchant l’existence réelle de celle qu’on a appelée la dame compatissante, ou la dame à la fenêtre, à laquelle on a si souvent attribué un caractère purement idéal et symbolique ; aucun doute non plus au sujet des sentimens, ou pour mieux dire des sensations, qu’elle avait éveillés en lui.

La révolution qui s’est alors opérée dans l’esprit comme dans l’âme de l’auteur d’Il Convito, alors qu’il écrivait celui-ci, se peint d’une manière poignante dans les vers dictés par « l’angoisse de ses soupirs », et dans l’emportement avec lequel il s’acharne à entrer en communion avec sa nouvelle maîtresse, la Philosophie. C’est à elle que, par une fiction indéfiniment poursuivie, il demandera l’oubli des émotions passées et les ivresses de sensations nouvelles. Mais ce ne sera pas sans lutte et sans déchirement qu’il quittera ce deuil auquel il avait convié l’univers tout entier. Et c’est aux péripéties de cette bataille qu’il consacre les vers sibyllins