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CXII
INTRODUCTION.

gence divine ne les concevrait pas. Puisqu’elles sont choses intrinsèquement possibles, Dieu peut les réaliser ; autrement, il n’aurait qu’une force bornée et restreinte. Dieu peut donc créer.

Mais comment ces raisons exemplaires qui sont Dieu en Dieu deviennent-elles, en prenant forme et individualité, créatures hors de Dieu ? C’est une question évidemment insoluble. La création se conçoit comme un rapport institué entre l’infini et le fini. Or, les rapports étant fondés sur la nature et les propriétés des deux termes, il s’ensuit que les rapports ne seront jamais connus qu’au degré même où sont connues les natures mises en regard. Puisque l’infini dépassera toujours le fini, il implique que la création n’offre pour l’homme aucun mystère.

Toutefois voici comment on pourrait se représenter l’apparition des êtres individuels.

Entre eux et le créateur, il y a des réalités qui participent de Dieu, et sont participées par chaque créature : c’est pour cela qu’on les nomme participations.

En soi, dans son fond intime, en tant qu’infinie, l’essence de Dieu est incommunicable, c’est-à-dire, qu’elle ne peut devenir commune à aucun être. En d’autres termes, les créatures ne participent point de Dieu, comme les espèces participent du genre, ni en ce sens qu’elles auraient avec lui une existence confondue, et par suite indiscernable et identique. Mais les créatures participent de Dieu, comme un effet participe de sa cause.

Cela étant, les participations se conçoivent comme propriétés ou vertus divines, qui resplendissent dans la création ; elles se conçoivent comme un miroir à double face, qui d’un côté reçoit le rayonnement des perfections infinies, et de l’autre les réfléchit, et en fixe l’empreinte sur les êtres individuels. Il suit de là que les participations soutiennent deux rapports : l’un avec Dieu qui les a produites, l’autre avec les êtres individuels dont elles sont l’essence.