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CXV
INTRODUCTION.

ses œuvres soit naturelles, soit surnaturelles. Or, parce que l’artisan possède sans doute ce qu’il a mis dans les merveilles de son art, on peut affirmer de celui-là les perfections qui resplendissent en celui-ci. Mais parce que les beautés que présentent les miracles de l’art sont chez l’artisan sous une forme plus excellente et plus pure, on peut nier en un certain sens de celui-ci ce qu’on affirme de celui-là. C’est pourquoi Dieu étant le créateur de tout, nous lui appliquons sans crainte les noms de toutes les réalités connues ; puis réfléchissant que son excellence dépasse toute perfection, nous refusons de le désigner par les noms des choses même les plus sublimes que l’on sache.

Il y a donc deux théologies, ou manières de s’exprimer touchant les attributs divins : l’une affirmative, l’autre négative. La première, comme le mot l’indique, consiste à tout affirmer de Dieu ; la seconde consiste précisément à tout nier de Dieu.

L’une et l’autre théologie est juste. D’abord on peut tout affirmer de Dieu, parce que, dès l’éternité, il possède en soi d’une manière suréminente toutes les perfections ; ensuite parce que c’est lui qui a répandu sur les créatures tout ce que nous leur voyons de bon et de beau. Ainsi il est éternité, intelligence et vie ; il est force, lumière et amour ; il est gloire, félicité et justice ; il est cause, moyen et fin de toutes choses ; il est la raison et la mesure des êtres. Et quoiqu’on s’abstienne de lui appliquer certains noms, à cause de l’idée d’imperfection qu’ils emportent, cependant parce que les exemplaires et prototypes des choses sont en lui, on peut dire que les choses elles-mêmes sont en lui, non pas formellement et substantiellement, mais bien d’une façon suréminente et suprà-substantielle. C’est d’après cette explication, et dans ce sens, que saint Denys affirme que Dieu est tout en tous.

D’un autre côté, on peut véritablement tout nier de Dieu ; car il est si excellemment au-dessus de tout ce que