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DE LA HIÉRARCHIE CÉLESTE.

pieds et des visages, ni qu’elles affectent la forme du bœuf stupide, ou du lion farouche, ni qu’elles ressemblent en rien à l’aigle impérieux, ou aux légers habitants des airs[1]. Non encore ; ce ne sont ni des chars de feu qui roulent dans les cieux, ni des trônes matériels destinés à porter le Dieu des dieux[2], ni des coursiers aux riches couleurs, ni des généraux superbement armés[3], ni rien de ce que les Écritures nomment dans leur langage si fécond en pieux symboles[4]. Car, si la théologie a voulu recourir à la poésie de ces saintes fictions, en parlant des purs esprits, ce fut, comme il a été dit, par égard pour notre mode de concevoir, et pour nous frayer vers les réalités supérieures ainsi crayonnées un chemin que notre faible nature peut suivre.

II. Quiconque applaudit aux religieuses créations sous lesquelles on peint ces pures substances que nous n’avons ni vues, ni connues, doit se souvenir que ce grossier dessein ne ressemble pas à l’original, et que toutes les qualifications imposées aux anges ne sont, pour ainsi dire, qu’imaginaires.

D’autre part, il y en a qui veulent que la théologie, quand elle prête un corps aux choses qui n’en ont pas, respecte du moins leur noblesse naturelle, et les dépeigne sous les formes les plus pures et les plus spiritualisées en quelque sorte, et n’aille pas appliquer les plus ignobles conditions du multiple à des substances éminemment simples et spirituelles. Car ainsi, croient-ils, notre pensée apprendrait à s’élever, et de sublimes vérités ne seraient pas défigurées par d’inconvenantes comparaisons : faire autrement, c’est

  1. Ezech., 1, 7.
  2. Daniel, 7, 9.
  3. Zach., 1, 8.
  4. II. Machab., 3, 25 ; Josue, 5, 13.