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XL
INTRODUCTION.


tion qu’il donne de ces mots, si elles s’appliquent avec justesse aux ascètes des temps postérieurs, pouvaient très-bien caractériser aussi quelques chrétiens de la primitive Église, qui avaient embrassé un genre de vie plus parfait. Car il enseigne que le nom de moines indique des hommes, non point ensevelis dans une solitude matérielle, mais se créant au fond de leur conscience une sorte d’isolement mystique, et se dégageant autant que possible des soucis mondains, pour s’unir plus intimement à Dieu. Il enseigne encore que le nom de thérapeutes indique des hommes voués au culte spécial et au service plus pur de la divinité. Or, que des néophytes généreux, dès l’origine du christianisme, aient fait profession publique de se donner à Dieu, et scellé leur promesse par une cérémonie religieuse, qui est-ce qui veut le nier ? Et que veut-on nier ? le droit ou le fait ?

Mais d’abord qu’il soit possible, qu’il soit même probable que l’Église naissante ait enfanté de telles âmes, c’est ce qu’on ne doit pas contester. Pourquoi les conseils de Jésus-Christ[1] et de saint Paul[2], touchant la pauvreté, la chasteté, la perfection, seraient-ils demeurés plus stériles que les autres oracles de l’Évangile ? Et pourquoi n’aurait-on pas compris et accepté cette vie intérieure et sans partage qui constitue proprement le moine, comme dit saint Denys ? Ensuite que cette discipline salutaire ait été réellement suivie par des personnes de l’un et de l’autre sexe, c’est ce qu’insinue le passage cité de saint Paul ; c’est ce que prouve ce mot de saint Ignace dans sa lettre aux Philippiens : Je salue le collége des Vierges. Il y a plus : Philon nous a laissé un petit traité de la vie contemplative, où il décrit les mœurs d’une classe d’hommes et de femmes qui s’appliquaient à honorer Dieu par les pratiques d’une religion plus soutenue. Sur quoi il faut observer, 1o que ces vrais philosophes sont appelés thérapeutes par Philon, aussi bien que par saint Denys, et pour la même raison[3] ;

  1. Matth., 19, 21.
  2. I Cor., 7, 32.
  3. De Vitâ contempl., initio.