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AU MOINE DÉMOPHILE.


tit, on loue en même temps son éminente fidélité à imiter Dieu souverainement bon : car il était plein de douce bonté, et c’est pourquoi on le nomme serviteur de Dieu, et on le répute plus digne que tous les prophètes de contempler la divinité. Également lorsque quelques téméraires voulurent lui contester ainsi qu’à Aaron le commandement du peuple et l’honneur du sacerdoce, il se montra supérieur à tout sentiment d’ambition et offrit de céder le gouvernement de la nation à celui que Dieu choisirait[1]. Et comme les conspirateurs, lui reprochant le passé, se portaient à des menaces injurieuses et déjà presque à la violence, dans sa bénignité, il invoqua le secours de Dieu très-bon, et protesta avec une mansuétude infinie qu’il était innocent de toutes les calamités qui frappaient la multitude : car il savait parfaitement que ceux qui jouissent de la familiarité de Dieu si clément doivent s’appliquer à lui devenir semblables, autant qu’il est possible, et se rendre le témoignage qu’ils agissent avec un esprit de douceur. Et pourquoi le Seigneur daigna-t-il tant aimer David son aïeul ? C’est que le Seigneur, infiniment bon et ami de la bonté, trouva en David un homme selon son cœur, et qui fut doux et indulgent envers ses envieux[2]. Au reste, d’après la loi, on devait prendre soin du bœuf de son ennemi[3]. Job dut sa justification à son innocente bonté[4]. Joseph ne se vengea pas de la perfidie de ses frères[5], et Abel s’en alla avec simplicité et sans défiance en la compagnie du fratricide Caïn[6]. Enfin la théologie a proclamé bons tous ceux qui ne soupçonnent et n’accomplissent pas le

  1. Num., 10.
  2. Psalm., 88, 21.
  3. Exod., 23, 4.
  4. Job., I. 8 ; et 42, 7.
  5. Gen., 50, 20.
  6. Gen., 4, 8.