Page:Darien, Bas les coeurs, Albert Savine éditeur, 1889.djvu/98

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parents à l’armée viennent de recevoir des lettres ― qui sont arrivées en bloc.

Elles ne chantent pas victoire, ces lettres. Oh ! non. Elles parlent de l’indiscipline générale de l’armée française et de l’organisation pitoyable de l’intendance militaire. Les régiments sont disloqués, bivouaquent au hasard, marchent sans ordre. Le nombreux personnel et les bagages de l’Empereur obstruent les routes et retardent de vingt-quatre heures, quelquefois de quarante-huit, la marche de l’armée.

On se les passe de main en main, ces lettres. J’en ai lu une dizaine, pour ma part ; et j’ai lu huit fois, au moins, la même phrase : « Nous avons bien des tentes, mais nous n’avons pas l’oncle. » Est-ce qu’ils se seraient donné le mot ?

Pour le calembour peut-être, mais pour le reste ?

Un journal, ce matin, publie une navrante histoire : « Hier soir, de six heures et quart à neuf heures et demie, la gare des marchandises de Reims a été mise au pillage par trois ou quatre cents traînards du corps de Failly. Ces soldats, appartenant à différentes armes,