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Page:Darien - Biribi (Savine 1890).djvu/161

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croix de bois noir. Au bout de la dernière rangée, une fosse est creusée auprès de laquelle se tiennent deux hommes appuyés sur des pelles.

— Hé ! vous, là-bas, espèces de fainéants ! leur crie l’adjudant, vous ne pouvez pas profiter du temps qui vous reste, quand vous avez fini de creuser votre trou, pour remettre des pierres sur le mur ?

Nous déposons le cercueil à côté de la fosse. On prépare les cordes.

— Tâchez d’aller doucement, dit l’adjudant. Sans ça, les caisses se déclouent en route. Je vous fiche tous dedans, si vous n’allez pas doucement.


Un des hommes en armes, que je ne connais pas, et qu’on me dit être un nommé Lecreux, employé au bureau, s’approche de lui, une feuille de papier à la main.

— Mon adjudant, voulez-vous avoir la bonté de me permettre de prononcer quelques paroles sur la tombe de notre camarade ?

— Dépêchez-vous, alors, nom de Dieu.

Lecreux déplie sa feuille de papier et commence :

« Cher camarade, c’est avec un bien vif regret que nous te conduisons aujourd’hui au champ du repos. Moissonné à la fleur de l’âge, comme une plante à peine éclose, tu as eu au moins, pour consoler tes derniers moments, le secours des sentiments religieux que garde dans son cœur tout Français digne de ce nom. Tombé au champ d’honneur, sur cette terre de Tunisie que tu as contribué à donner à ta patrie, ta place est marquée dans le Panthéon de tous ces héros inconnus qui n’ont point de monument. Ton pays, ta famille doivent être fiers de toi. Et pourquoi obscurcirait-elle ses vêtements, ta fa-