Page:Darien - Biribi (Savine 1890).djvu/195

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— Mais qu’est-ce que c’est donc que ce général-là ? me demande Hominard, qui est placé à côté de moi. Est-ce que c’est un phénomène en vacances ?

Je ne sais pas au juste. Je n’en ai entendu parler que par quelques journaux qui, je ne me rappelle plus comment, me sont tombés entre les mains et par les racontars des nouveaux arrivés de France. Il paraît qu’on ne parle que de lui, là-bas, de ses grandes capacités, de son patriotisme, de ses sentiments républicains, de toutes les qualités, enfin, qui mettent un homme hors de pair et en font la bête blanche d’un peuple. Je ne serais pas fâché de le voir. C’est peut-être un phénomène, réellement…

— Garde à vos !

Là-bas, tout au bout de la route, au milieu des manteaux rouges d’une trentaine de spahis, une voiture arrive au grand trot. Le capitaine se tourne vers l’adjudant et, lui frappant sur l’épaule :

— Vous le voyez, celui-là ? Eh bien ! il sera ministre de la guerre !

La voiture est à cinquante pas.

— Portez… armes ! Présentez… armes !


Prestement, le général est descendu et s’est avancé vers le capitaine. Nous l’avons vu. Nous avons vu sa belle barbe poivre et sel, ses bottes à éperons énormes et son képi à la Saumur, qui dissimule mal une coiffure de garçon boucher.

Après les compliments d’usage, il s’est décidé à passer devant les rangs. Notre uniforme, qu’il n’a jamais vu, paraît l’étonner fortement.

— Et de quelle couleur sont leurs képis ? demande-t-il au capitaine, intrigué qu’il est par la forme étrange