Page:Darien - Biribi (Savine 1890).djvu/268

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— Empoignez-moi cet homme-là, Cristo ! ― Vous m’insultez ! vous m’insultez !


Trois gradés, deux sergents et un caporal, se sont précipités hors de la baraque. Ils m’ont saisi par les bras et par le cou et m’ont traîné jusqu’à un gros arbre qui s’élève, seul et desséché, à une cinquantaine de pas de la route.

— Apportez-moi des cordes ! crie Norvi à un homme de garde.

— Mais qu’est-ce que j’ai fait, sergent ? Pourquoi m’attachez-vous ?

— Silence ! porco ! ou je vous mets le bâillon !

Ils m’ont attaché les pieds, les mains, et m’ont lié étroitement à l’arbre ; puis ils m’ont laissé seul.


Que penser ? que croire ? J’ai passé quatre heures à me les poser, ces deux questions, sans trouver de réponse, ou en trouvant trop ; ne sentant pas la morsure des cordes qui m’entraient dans les chairs, mais avec la sensation d’une douleur sourde, causée par un coup de masse, sur la tête.


À neuf heures, le clairon sonne pour la lecture du rapport. Je tends l’oreille, mais il m’est impossible de surprendre autre chose qu’un bredouillement indécis.

— Rompez les rangs, marche !

Craponi se dirige vers moi, son cahier de rapports à la main. Il s’arrête à trois pas, remuant deux secondes ses lèvres blêmes.

— Froissard ― huit jours de prison ― lorsque le sergent chef de détachement lui faisait une obser-