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Page:Darien - L’Épaulette, Fasquelle, 1905.djvu/152

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— Ah ! le brigand ! le cafard ! C’est une vengeance ! Il se venge, le sale cocu, de toutes les cornes que je lui ai fait porter !… Et je m’explique, maintenant, ma mésaventure au ministère. C’est encore lui qui m’avait dénoncé… Je lui revaudrai ça, n’aie pas peur… En attendant, il faut parer au plus pressé, il y a déjà un cochon de journal, ce matin, qui m’appelle « satyre à épaulettes. » Voyons… Je vais d’abord aller voir Gambetta ; Lahaye-Marmenteau est un cagot et un ratapoil qu’il déteste ; moi, je suis républicain, libre-penseur ; c’est l’exemple de Gambetta qui m’a soutenu et inspiré, à l’armée de la Loire ! Étais-je à Nourhas, oui ou non ? Gambetta peut clore le bec aux journaux… Et puis, j’irai voir Mac-Mahon… Vieux camarade… Wiesbaden… Il ne permettra jamais que pour une peccadille…

Et mon père me met au courant des démarches qu’il veut faire. Il les commencera dès demain, et nous verrons.

Nous avons vu. La presse n’a pas soufflé mot. Mon père a été nommé attaché militaire à l’ambassade française à Berlin. Il est parti pour l’Allemagne à la fin du mois de septembre.



Je ne suis pas très « avancé » pour mon âge. Près de trois années doivent donc s’écouler avant que je puisse me présenter à Saint-Cyr. Quand et comment ai-je pris la détermination d’entrer à Saint-Cyr ? Je ne pourrais le dire. À parler franc, je n’ai même jamais pris aucune détermination à ce sujet. La chose s’est faite d’elle-même, se fait d’elle-même, comme normalement. Je vais à l’armée sans hésitation et sans examen, naturellement ; à peu près comme le jeune caneton, dès qu’il a brisé sa coquille, se dirige vers la mare afin d’y faire un plongeon.