Page:Darien - L’Épaulette, Fasquelle, 1905.djvu/204

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sons qu’ils exhibent orgueilleusement, après boire. Cette noblesse de fantaisie emplit de ses ridicules mensonges l’Annuaire de l’Armée. Elle affecte un immense mépris pour les civils et les républicains — les voyous. L’arrogance, d’ailleurs, est de règle devant le commun des mortels ; exactement comme la platitude en présence des supérieurs.

La préoccupation intime, facilement avouée, c’est la fortune, l’argent. La solde est maigre ; et, bien qu’avec la somme que nous recevons mensuellement, un ouvrier trouverait moyen de nourrir sa famille, nous ne pouvons vivre. Il y a tant de dépenses nécessaires, inutiles et obligatoires ! Heureux ceux qui ont de la fortune ; à plaindre ceux qui n’en ont pas. À quels procédés recourent ces derniers pour se procurer des fonds, l’Honneur de l’Armée seul le sait. Et cet argent ? Tout aux tavernes et aux filles — comme au bon vieux temps. — La noce basse. Le jeu. Quant à l’intellectualité, à part de très rares exceptions, néant. Nulle notion, nul soupçon du beau ou du vrai. Nul effort pour comprendre ce que c’est que la Patrie, ce qu’elle peut être ; ce que c’est qu’un soldat, en réalité ; ce que doit être un officier ; ce que c’est que la Nation armée. Ce sont là des choses qu’il n’est même pas question de savoir. Un vague sentiment d’un vague devoir professionnel, très élastique. Et un culte, d’une sincérité maladive, pour des traditions crevées, des rengaines pourries.

Des types ? Pas de types. Les semblants de caractères se distinguent par leur degré plus ou moins marqué d’enfantillage. Leurs seuls signes particuliers sont des marottes, des dadas. Un être puéril, généralement, l’officier ; en dépit de sa rudesse fréquente, de son autoritarisme, même de sa cruauté ; peut-être à cause de tout ça ! Un pauvre être.

En voici un, par exemple. Grand, mince ; toujours tiré