Schurke prédisait, en raison de son intrépidité sexuelle, un brillant avenir. Nous avons causé. M. Issacar n’est point surchargé de travail ; il ne se plaint pas de la situation qu’il occupe aux Invalides et qu’il doit à son coreligionnaire Camille Dreikralle. Son emploi n’est qu’une sinécure ; ainsi, d’ailleurs, que presque tous les emplois du personnel de l’Hôtel. Ce personnel n’a pas varié depuis l’époque où les Invalides servaient de refuge à trois mille hommes ; il est de cent vingt-cinq individus ; et le nombre des malheureux qu’hospitalise l’Hôtel s’élève aujourd’hui à cent vingt tout au plus. M. Issacar n’est point hostile aux sinécures, au moins pour son compte ; elles conviennent, dit-il, aux tempéraments méditatifs et philosophiques, toujours utiles à l’humanité ; et il approuve presque le gouvernement de les entretenir avec un soin jaloux.
— Il est seulement regrettable, a-t-il dit, que ce pauvre gouvernement ne veille pas aussi jalousement sur lui-même. L’honnêteté n’est pas nécessaire au système parlementaire ; j’oserai même dire qu’elle lui est funeste. Car le système parlementaire est, par essence et définition, une représentation, c’est-à-dire un simulacre instable ; et l’honnêteté est une réalité rigide ; il y a donc incompatibilité, grosse de périls. Mais un certain décorum est indispensable. Nos honorables en manquent trop. Du haut en bas, — je devrais dire du bas en haut, afin de monter jusqu’à l’Élysée, — c’est la même chose. Qu’on vende tout, je l’admets ; qu’on empoche son salaire en public et qu’on fasse trébucher la monnaie sur la tribune, je ne l’admets pas. Quand Judas recevait ses trente pièces d’argent, il se les faisait présenter dans une bourse. Il donnait là un grand exemple, qu’on a trop vite oublié. Enfin… Les parlementaires ne sont pas solides ; le gouvernement peut s’effondrer d’un moment à l’autre ; Boulanger a plus de chances que jamais. Il a des chances, surtout,