sant à la simple approche du drapeau tricolore, s’effondrant sous le feu des canons français ; des choses, enfin, comme le colonel Gabarrot m’en décrivait autrefois.
Mais le 5 août, au lieu d’une victoire, c’est la défaite de Wissembourg, qu’annoncent les journaux : l’écrasement d’une division française, la mort du général Abel Douay… J’ai lu cela avec un amer étonnement, avec une sorte de rage indignée contre les Prussiens, qui se sont permis d’avoir l’avantage dans une rencontre avec nos troupes. Cela me semble illogique, pas naturel ; c’est le monde renversé, en vérité. Ces Prussiens ont dû avoir recours à des stratagèmes odieux pour escamoter la victoire. Fausse victoire, sûrement, et qui sent la tricherie d’une lieue. Néanmoins, je lis et je relis le compte rendu du conflit, avec une grande émotion, le sang à la tête, les joues empourprées, presque comme si j’avais éprouvé une humiliation personnelle.
Cependant, ainsi que le dit le journal, le succès des Allemands à Wissembourg n’a été que le résultat d’une surprise ; instruites par l’expérience, les troupes françaises n’offriront plus à l’ennemi d’avantages aussi faciles. Nous recevrons avant peu, sans aucun doute, la nouvelle d’une glorieuse revanche. Il n’est pas possible que l’armée française ne se maintienne point à la hauteur où l’a placée sa gloire passée. Il est impossible qu’elle n’ajoute point une page magnifique à sa prestigieuse histoire. Elle nous offrira avant peu des spectacles en rapport avec ses hauts faits légendaires, des spectacles semblables à ceux qu’évoque en moi le souvenir des récits qui me furent faits par les acteurs des luttes héroïques d’autrefois.
Mais le 7, arrivent, en même temps, la nouvelle de la déroute de Wörth — une déroute que des dépêches menteuses avaient travestie, d’abord, en un grand succès qu’on avait commencé à fêter — et celle de la défaite de Forbach. C’est extraordinaire, inconcevable !