Page:Darien - L’Épaulette, Fasquelle, 1905.djvu/94

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trompés, détruits, l’un après l’autre. Que de désillusions, que de mécomptes ! J’ai, pour la première fois, le pressentiment, la notion confuse, de notre impuissance à diriger les événements, à lutter contre les circonstances. Quelle influence n’aura pas ce coup de pied de cheval sur la destinée de mon père ? Qui aurait pu penser à une chose semblable ? J’avais songé à des possibilités tragiques, et une blessure grave, même à la mort… Mais ce coup de pied de cheval…



Le 2 septembre, arrive la nouvelle de la défaite essuyée le 31 août par Bazaine ; le maréchal et ses troupes sont définitivement refoulés dans Metz. Le 3 septembre, au soir, les nouvelles sont plus mauvaises encore. On annonce l’écrasement complet de l’armée de Châlons ; d’après les dires des journaux, l’armée française aurait capitulé à Sedan, et l’Empereur se serait rendu à l’ennemi avec 80.000 hommes. Le lendemain matin, ces informations sont confirmées ; il n’y a plus à douter du désastre. Dans la soirée, la République est proclamée.

Le nouveau gouvernement, sur des affiches qui tapissent les murs, déclare ceci : « Pour sauver la patrie en danger, le peuple a demandé la République. La République a vaincu l’invasion en 1792 ; la République est proclamée. La Révolution est faite au nom du Droit, du Salut public. »

Et un journal, qui a peine à cacher la joie que lui cause la catastrophe, s’écrie : « Hier, la Prusse avait devant elle une armée ; aujourd’hui, elle a devant elle un peuple… »



Ça n’arrête pas les Prussiens, d’avoir devant eux un peuple au lieu d’une armée. Ah ! non ! Ça semble leur