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de la personnalité humaine comprimée, qui cause tant de douleur aux êtres forts, n’est plus une source de souffrance pour eux. Le sens moral, qui est le sens de l’action, leur manque. Ils ne savent plus ce que c’est qu’un acte ; ils en sont aux agissements. Et l’on dirait que la seule chose entière qui reste en eux, c’est cette rage interne, cachée dans les plus noirs replis de l’amour-propre, qui soulève en secret l’être ignorant, pusillanime et pervers contre tout ce qui vaut mieux que lui.

La défaite trempe le caractère d’une nation ; ou le brise.



La victoire est un résultat, pas une preuve.
Lessing.

La France a toujours affirmé qu’elle avait « une mission civilisatrice. »

L’exagération est ici tellement manifeste que toute discussion devient inutile. Que la langue française ait servi de véhicule, à travers le monde, à de grandes idées, pour la plupart d’origine étrangère, cela n’est pas niable ; reste seulement à savoir quel prix eurent généralement à payer, dans leur pays, ceux qui exposèrent ces idées, et quels sentiments d’estime et d’admiration singulières ils professaient pour la France. Mais, de là à conclure à une mission civilisatrice, il y a loin. Et si l’on voulait s’en tenir aux résultats coloniaux obtenus dans le passé et dans le présent, il vaudrait mieux ne pas insister.

La France assure aussi qu’elle a « une mission libératrice. » C’est un peu plus sérieux. Il est certain qu’elle contribua — et beaucoup plus efficacement qu’elle ne le pense — à l’indépendance des États-Unis. Mais la « mission » me semble commencer là et s’arrêter là. La libération de certains peuples fut souvent un prétexte à l’invasion de certains pays ; mais rien qu’un prétexte. Je ne dis pas que les Français entreprirent toutes leurs guerres