Page:Darien - La Belle France.djvu/30

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S’il n’en est rien ; si cette Exposition est seulement un intermède ; si, dès qu’elle sera terminée, Chauvin doit recommencer à battre sa caisse et à empiler les écus des pauvres gens dans le tonneau des Danaïdes qui lui sert de coffre ; alors, on doit avertir les Français qu’ils font fausse route et qu’ils se préparent d’amers déboires.

Je sais qu’il est toujours dangereux de prophétiser. Helvétius écrivait, au sujet de la France, en 1771 : « Cette nation avilie est aujourd’hui le mépris de l’Europe. Nulle crise salutaire ne lui rendra la liberté. C’est par la consomption qu’elle périra : la conquête est le seul remède à ses malheurs. » Et pourtant, moins de vingt ans après, cette nation s’était relevée d’un bond… Est-ce bien sûr ?… Car, pourtant, juste cent ans après, cette nation était totalement écrasée… Cela, c’est certain… Eh bien ! non ! ce n’est pas vrai, qu’il soit toujours dangereux de prophétiser ! Quand on voit clair, on peut commettre une erreur de temps, mais voilà tout ; et Helvétius voyait clair. Que les causes qui, selon lui, produisaient la décadence française soient encore en existence, que le grand mouvement de la fin du siècle dernier n’ait eu qu’une signification réactionnaire et un effet déprimant, c’est ce que j’espère démontrer. Ce livre n’a point d’autre objet.

Et j’espère prouver, aussi, que le rôle militaire de la France est terminé. Je n’ignore pas les rêves de beaucoup, les chimères sur lesquelles voyagent certains esprits ; je connais les projets combinés, les plans élaborés en vue de la grande lutte qui, certainement, est imminente. Je pense aussi que la France ne renoncera pas, à moins d’y être contrainte, à son caractère guerrier. Je crois qu’elle y sera contrainte.

Nous allons étudier les causes qui, d’après moi, ont depuis longtemps préparé ce changement complet dans les destinées d’un grand pays. Quant aux événements immédiats qui amèneront directement cette transformation, je ne puis les prévoir ; ils n’auront, d’ailleurs, qu’une importance relative. Tout est possible. Il est même possible que la France aille au feu, pour la dernière fois,