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LE VOLEUR

indices, imperceptibles à la Vertu planant sur les plus hauts sommets, sont facilement déchiffrables pour le crime habitué à ramper bestialement dans la poussière d’ici-bas. Le vice a ses petites compensations.

Non, il n’y a personne ici, et je n’ai pas besoin de me gêner. Je tire ma lanterne de mon sac et je l’allume. Je suis dans un vestibule spacieux, au plafond élevé, digne antichambre d’une maison sans doute meublée dans le style sobre et sévère, mais riche, cher encore à la bourgeoisie provinciale. Plusieurs portes font de grandes taches sombres sur le revêtement de marbre blanc. J’en tourne les boutons ; elles sont toutes fermées. Fort bien. Ce n’est pas là que j’ai à faire.

Je monte l’escalier, un escalier large, à la rampe de fer ouvragé, et je m’arrête sur le palier du premier étage, dallé noir et blanc, comme le vestibule. C’est là que se trouve le cabinet de Monsieur. En face, à droite ou à gauche ? L’abbé a négligé de m’en instruire. À droite, probablement. Essayons. D’un coup de pince, j’ouvre la porte ; et un regard à l’intérieur me fait voir que j’ai deviné juste. J’entre.

C’est une grande pièce, d’aspect rigide, au beau plancher de vieux chêne, aux hautes fenêtres. Deux bibliothèques dont l’une, très grande, occupe tout un pan de mur ; des sièges de cuir vert sombre, hostiles aux conversations frivoles ; des tableaux, portraits de famille, je crois, qui semblent reculer d’horreur au fond de leurs cadres d’or ; et, au milieu du cabinet, un énorme et superbe secrétaire Louis XVI, fleuri d’une garniture merveilleusement ciselée.

— C’est ce secrétaire-là qui contient le magot, m’a dit l’abbé. Si vous y trouvez, comme c’est probable, les bijoux de Madame et de Mademoiselle, il sera inutile de rien chercher ailleurs. Faites attention, car il y a des tiroirs à double-fond ; ne manquez pas de fouiller partout.


C’est fait. J’ai fouillé partout et ma récolte est ter-