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Page:Darien - Le Voleur, Stock, 1898.djvu/270

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LE VOLEUR

Je suis monté ici directement et j’ai même apporté ma valise…

— Tes valises, tu veux dire.

— Si tu y tiens ; quoique la petite ne soit en ma possession que depuis très peu de temps.

— Ah ! tu l’as fabriquée dans le train. On fait ça de temps en temps, pour s’amuser ; car autrement… Généralement, on y trouve un rasoir et un tire-bottes. Qu’est-ce qu’il y a dans celle-là ? Tu ne sais pas ? Ce n’est pas la peine de regarder à présent ; nous verrons plus tard.

Et il va déposer la petite valise à initiales sur la mienne, dans un coin, près d’une fenêtre, tandis qu’une servante met le couvert sur la table du salon.

— Je vais te présenter à Hélène dès que cette fille sera partie, me dit-il en revenant vers moi. Elle est très, très gentille, mais un peu enfant ; tu comprends, élevée comme elle l’a été ! Elle me semble un peu réservée aussi, un peu circonspecte, si tu veux.

— C’est assez naturel ; elle ne sait rien de toi ni de tes projets. Et quelles sont ses dispositions envers toi ?

— Oh ! elle m’est toute dévouée ; elle me l’a répété dix fois depuis hier — peut-être pour me décider à lui faire part de mes intentions à son égard…

— Et quelles sont tes intentions ?

— Cela, mon cher, c’est compliqué. Mais je ne veux pas t’en faire un mystère ; d’autant moins que je désire t’intéresser largement à mes combinaisons. J’ai besoin d’un homme instruit, audacieux, qui serait assez bien élevé pour pouvoir se conduire en sauvage, et qui aurait assez étouffé de scrupules pour oser se permettre d’agir en honnête homme. On m’a donné des renseignements sur toi ; je t’ai vu suffisamment pour m’être fait, à ton endroit, quelques opinions qui, je pense, ne sont pas fausses ; et je crois que tu es l’homme que je cherche. Si nous nous entendons, le cambriolage que nous avons exécuté ensemble à Malenvers aura été le dernier auquel tu auras participé. Il ne s’agira plus de forcer les secrétaires des bourgeois mais…