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LE VOLEUR

marche. J’ai votre carte… Les lettres me seront-elles rendues si je réussis ? ajoute-t-il anxieusement.

— Mon Dieu ! Monsieur, dis-je en souriant, vous vous entendrez à ce sujet avec Mlle  Canonnier quand elle sera Mme  de Bois-Créault. Vous ne manquerez pas, j’imagine, d’aller lui présenter vos hommages. Et je ne vois point pourquoi elle ne vous remettrait pas ces lettres — au moins une par une.

— La vie est une comédie sinistre, dit Barzot.

C’est mon avis. Mais je me demande, en descendant l’escalier, si Barzot n’était pas très heureux, ces jours derniers encore, d’y jouer son rôle, dans cette comédie que ses grimaces n’égayaient guère. Allons, j’ai probablement baissé le rideau sur sa dernière culbute.


Et c’est Hélène qui va paraître sur la scène, à présent, en pleine lumière, saluée par les flons-flons de l’orchestre, aux applaudissements du parterre et des galeries.

Je l’ai mise au courant de ce qui s’était passé entre Barzot et moi. Elle m’a écouté avec le plus grand calme, sans manifester aucune émotion.

— Vous rappelez-vous ce que je vous ai dit hier soir, m’a-t-elle demandé quand j’ai eu fini mon récit ? Hier soir, dans la voiture qui m’a amenée ici ? Vous m’avez dit que nous causerions de tout cela aujourd’hui, et je vous ai répondu qu’il serait trop tard.

— Eh ! bien, s’il est trop tard, Hélène, n’en parlons pas.

— Non… Mais vous vous souviendrez peut-être, et moi aussi, de ce que je vous ai proposé.

— Je souhaite que vous soyez toujours assez heureuse pour ne jamais vous en souvenir. Et j’espère que vous ne m’en voudrez pas d’avoir manqué de confiance en moi-même.

— Pourquoi n’avez-vous pas confiance en vous ? Je crois le deviner. Lorsque vous avez résolu d’adop-