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d’un célèbre vêtement de la cour byzantine, le skaramangion qui, identique au caftan des cavaliers barbares, s’est conservé jusqu’à nos jours comme un précieux témoignage du passé dans le dolman du costume de gala hongrois. C’est par l’intermédiaire des Sassanides qu’il fut connu à Byzance, mais ses origines remontent aux cavaliers nomades de l’Asie ; on en retrouve le prototype sur ces statuettes sibériennes fort anciennes qu’on admire à l’Ermitage de Léningrade. D’autre part, les tableaux de Gentile et de Mantegna sont là pour attester la pénétration de ce costume dans l’Italie du XVe siècle ; en outre, il devait être connu, d’après le témoignage des miniatures du Xe au XIIe siècle même à la cour de Charlemagne. Et n’était-ce pas aussi chez les Serbes, les Croates, les Dalmates et les Roumains un vêtement d’apparat fort répandu des cavaliers artistocratiques ? On peut assigner une origine touranienne au veston long et large, dit καββάδιον, et au « tchitchak », en transcription grecque τζιτζάκιον qui pénétra à Byzance par l’intermédiaire des Khazars. Selon Pro-cope, le pantalon collant et les bottes furent mis à la mode à Byzance par les Huns et en très peu de temps ils y furent généralement adoptés. D’après les études de Seyrig, le point de départ du pantalon collant est à chercher chez les cavalier nomades de la Mongolie et du Turkestan ; il fut ensuite adopté par les Parthes qui finirent par l’introduire en Asie antérieure et en Égypte. La tente avare, le rideau hun et le « cserge » hongrois (baignoire portable en cuir pour l’usage des camps) servirent, au dire des sources byzantines, de modèle à l’équipement du camp des empereurs de Byzance ; ils font bien voir que les manières de vivre des cavaliers nomades ont agi non seulement sur l’habillement, mais encore sur l’équipement militaire des Byzantins.

Dans mon étude parue dans Byzantion [1], j’ai essayé d’élucider d’une manière détaillée le processus millénaire, grâce auquel — par une série d’emprunts lents et graduels — la tactique ancestrale des peuples nomades cavaliers pénétra

  1. Influences touraniennes sur l’évolution de l’art militaire des Grecs, des Romains, et des Byzantins, dans Byzantion, t. X (1935), pp. 443-469 ; t. XII (1937), pp. 119-147.