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RETOUR PAR LA COULEUR.

tion sur l’extermination du Bizet sauvage ; 2o l’improbabilité que l’homme ait autrefois domestiqué complètement et rendu fécondes en captivité autant d’espèces différentes ; 3o ces espèces différentes n’étant nulle part redevenues sauvages ; 4o le fait extraordinaire que l’homme ait, avec intention ou par hasard, choisi pour les domestiquer, plusieurs espèces très-anormales par leurs caractères, ce qui est d’autant plus improbable que les points de conformation sur lesquels portent les anomalies de ces espèces supposées sont actuellement au plus haut degré variables ; 5o le fait que toutes les races, malgré leurs différences sur plusieurs points essentiels de leur conformation, produisent des métis tout à fait fertiles ; tandis que tous ceux qu’on a obtenus par le croisement d’espèces très-voisines de la famille des Pigeons se sont trouvés stériles ; 6o la tendance remarquable qu’ont toutes les races, à donner (surtout quand on les croise) des produits qui font retour aux caractères du Bizet sauvage, par des menus détails de coloration, et qui varient d’une manière semblable. Ajoutons à ces arguments l’improbabilité qu’il ait autrefois existé un certain nombre d’espèces différant considérablement les unes des autres par quelques points de conformation, et se ressemblant entre elles par d’autres comme la voix, les mœurs et toutes leurs habitudes, autant que le font les races domestiques. Tous ces faits et ces arguments étant loyalement pris en considération, il faudrait, pour nous autoriser à admettre la descendance de nos races domestiques de plusieurs souches primitives, un ensemble écrasant de preuves évidentes qui, jusqu’à présent, nous font absolument défaut.

L’opinion que nous combattons doit, sans aucun doute, son origine à l’improbabilité apparente que d’aussi fortes modifications de conformation aient pu être effectuées depuis la domestication du Bizet par l’homme ; aussi ne suis-je point surpris qu’on ait hésité à admettre leur origine commune, car autrefois, lorsque je contemplais dans mes volières des oiseaux comme les Grosses-gorges, les Messagers, Barbes, Culbutants courtes-faces, etc., je ne pouvais me persuader que tous pussent descendre d’une même souche primitive et que toutes ces modifications remarquables ne fussent, en quelque sorte, qu’une création de l’homme. C’est pour cette raison que j’ai