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SÉLECTION.

d’un éleveur éminent, M. Eaton[1] dont nous avons déjà cité les paroles (chapitre sixième, page 229), qui montrent que l’art de produire des pigeons de fantaisie n’est rien moins que simple : la solennité de ses préceptes peut même provoquer le sourire, mais celui qui raille ne gagnera jamais de prix.

Comme nous l’avons déjà remarqué, ce sont nos concours qui démontrent le mieux ce dont la sélection appliquée aux animaux est capable. Les moutons appartenant à quelques éleveurs anciens, tels que Bakewell et lord Western, avaient été tellement changés, que bien des personnes n’ont pu croire qu’ils n’eussent pas été croisés. Nos porcs, selon la remarque de M. Corringham[2], ont dans ces vingt dernières années, subi une métamorphose complète, due tant à des croisements qu’à une sélection rigoureuse. La première exposition de volailles eut lieu en 1845, au Jardin Zoologique, et les améliorations apportées depuis cette époque ont été grandes. M. Baily m’a fait remarquer, qu’autrefois on avait décidé que le coq Espagnol aurait la crête droite, et au bout de quatre ou cinq ans, tous les bons oiseaux l’eurent ainsi ; on prescrivit, chez le coq Huppé, l’absence de crête et de plumes sétiformes, aujourd’hui un oiseau qui en aurait serait laissé de côté ; on prescrivit ensuite la barbe, et à l’exposition de 1860, au palais de Cristal, tous les coqs exposés dans cinquante-sept compartiments, eurent la barbe. Il en a été de même pour une foule d’autres cas. Mais dans tous, les juges ne prescrivent que ce qui peut occasionnellement se produire, et ce qui peut être amélioré ou rendu constant par la sélection. L’augmentation constante de poids chez les volailles, dindes, canards et oies est très-remarquable ; des canards pesant six livres sont actuellement communs, la moyenne était autrefois de quatre livres. Comme on n’a pas souvent indiqué le temps nécessaire pour opérer un changement, je citerai qu’il a fallu à M. Wicking, treize ans pour donner au Culbutant amande une tête blanche, « un triomphe dont, » dit un autre éleveur, « il peut être fier à juste titre[3]. »

M. Tollet, de Betley Hall, a choisi des vaches et surtout

  1. J. M. Eaton, Treatise on Fancy Pigeons, 1852, p. xiv. — Treatise on Almond Tumbler, 1851, p. 11.
  2. Journ. Roy. Agric. Soc., vol. VI, p. 22.
  3. Poultry Chronicle, vol. II, 1855, p. 596.