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Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/302

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DES CONDITIONS EXTÉRIEURES.

caux[1]. Le Rhododendron ciliatum cultivé à Kew, donne des fleurs plus grandes et plus pâles que celles qu’il porte dans les montagnes de l’Himalaya dont il provient, au point que le Dr Hooker[2] n’aurait pas pu reconnaître l’espèce par ses fleurs seules ; d’autres cas analogues et nombreux pourraient encore être cités.

Les expériences de Vilmorin et de Buckman sur les carottes et le panais, prouvent qu’une nourriture abondante produit sur les soi-disantes racines de ces plantes des effets héréditaires et définis, sans que leurs autres parties éprouvent presque aucun changement. L’alun agit directement sur la couleur des fleurs de l’Hydrangea[3]. La sécheresse paraît généralement favoriser la villosité des plantes. Gärtner a observé que les Verbascums hybrides deviennent extrêmement velus lorsqu’on les fait croître en vases. M. Masters, d’autre part, assure que l’Opuntia leucotricha, qui, sous l’action d’une chaleur humide, est bien couvert de beaux poils blancs, n’offre rien de semblable, lorsqu’on le tient à une chaleur sèche[4]. Une foule de variations légères, qui ne valent pas la peine d’être détaillées, ne persistent qu’aussi longtemps que les plantes croissent dans certains sols. Sageret[5] d’après ses observations, en donne quelques exemples. Odart, qui insiste beaucoup sur la permanence des variétés du raisin, reconnaît[6] que quelques-unes d’entre elles, soumises à un traitement différent ou croissant sous un autre climat, varient légèrement par la teinte du fruit et l’époque de sa maturation. Quelques auteurs ont nié que la greffe causât la moindre différence dans la plante greffée, mais on a des preuves nombreuses que le fruit en est quelquefois légèrement affecté dans sa grosseur et sa saveur, les feuilles dans leur durée, et les fleurs dans leur aspect[7].

Quant aux animaux, nous avons vu, dans le premier chapitre, que les chiens européens dégénèrent dans l’Inde, tant par leur conformation que par leurs instincts ; mais les changements qu’ils éprouvent sont de nature telle, qu’ils peuvent être en partie dus à un retour vers la forme primitive, comme dans le cas des animaux marrons. Dans quelques parties de l’Inde, le dindon perd de sa taille, et les appendices pendants de son bec se développent énormément[8]. Nous avons vu combien le canard sauvage perd rapidement ses caractères lorsqu’il est domestiqué, par suite du changement et de l’abondance de sa nourriture, et du manque d’exercice. Sous l’action directe du climat humide et des maigres pâturages des îles Falkland, le cheval y décroît très-rapidement de taille. D’après des informa-

  1. Godron, O. C., t. II, p. 52.
  2. Journ. Hort. Soc., t. VII, 1852, p. 117.
  3. Ibid., t. I, p. 160.
  4. Lecoq, sur la villosité des plantes, Geog. Bot., t. III, p. 287, 291. — Gärtner, O. C., p. 261. — Masters, sur l’Opuntia, Gardener’s Chron., 1846, p. 444.
  5. Pomologie phys., p. 136.
  6. Ampélographie, 1849, p. 19.
  7. Gärtner, O. C., p. 606, a réuni presque tous les cas connus. A. Knight, Trans. Hort. Soc., vol. II, p. 160, va jusqu’à soutenir qu’il n’y a que peu de variétés absolument permanentes par leurs caractères, lorsqu’on les propage par bourgeons ou par greffes.
  8. M. Blyth, Ann. and Mag. of Nat. Hist., v. xx, 1847, p. 391.