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Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/310

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DES CONDITIONS EXTÉRIEURES.

Je puis signaler ici les effets remarquables qu’exercent quelquefois sur les plantes les champignons parasites. Reissek[1] a décrit un Thesium qui, attaqué par un Œcidium, s’était fortement modifié et avait pris quelques-uns des traits caractéristiques de quelques espèces, et même de genres voisins. « En supposant, » remarque Reissek, « que l’état primitivement déterminé par le champignon fût par la suite devenu constant, on eût certainement regardé la plante comme formant une espèce distincte, ou appartenant même à un genre nouveau. » Je cite cette remarque pour montrer combien cette plante a dû être profondément, bien que très-naturellement, modifiée dans son apparence par le champignon parasite.


Faits et considérations contraires à l’opinion que les conditions extérieures puissent être une cause efficace de modifications définies dans la conformation. — J’ai fait allusion aux différences légères qui existent entre les espèces vivant naturellement dans des pays distincts, sous des conditions différentes, et que nous sommes d’abord disposés, probablement jusqu’à un certain point avec raison, à attribuer à l’action définie des conditions ambiantes. Mais il faut songer qu’il y a un bien plus grand nombre d’animaux et de plantes qui, ayant une distribution fort étendue, et s’étant par conséquent trouvés exposés à des conditions des plus diversifiées, ont cependant conservé une grande uniformité de caractères. Quelques auteurs attribuent les variétés de nos plantes culinaires et agricoles, à l’action définie des conditions auxquelles elles ont été soumises dans les diverses parties de la Grande-Bretagne ; mais il y a environ deux cents plantes[2] qui, se rencontrant dans tous les comtés, ont dû, pendant une longue période, être exposées à des différences considérables de climat et de sol, sans cependant différer entre elles. Ainsi encore quelques oiseaux, insectes et autres animaux, s’étendent sur de vastes parties du globe, tout en conservant les mêmes caractères.


Malgré les faits précédemment donnés de l’apparition de maladies locales toutes particulières, de modifications étranges déterminées dans la structure des plantes par l’inoculation du poison de quelques insectes, et autres cas analogues, il y a cependant une multitude de variations, telles que le crâne modifié du bouledogue et du bétail niata, les longues cornes du bétail cafre, les doigts réunis des porcs à sabots pleins, l’énorme huppe et

  1. Linnæa, v. xvii, 1843, cité par Dr M. F. Masters, Royal Institution, mars 16, 1860.
  2. Hewett C. Watson, Cybele Britannica, vol. I, 1847, p. 11.