CHAPITRE XXIV.
LOIS DE LA VARIATION. — USAGE ET DÉFAUT D’USAGE.
Dans ce chapitre et les deux suivants, je discuterai, aussi bien que me le permettra la difficulté du sujet, les diverses lois qui régissent la variabilité, et qu’on peut grouper sous les chefs suivants : les effets de l’usage et du défaut d’usage, comprenant les changements d’habitudes et l’acclimatation, — les arrêts de développement, — les variations corrélatives, — la cohésion des parties homologues, — la variabilité des parties multiples, — les compensations de croissance, — la position des bourgeons sur l’axe de la plante, — et enfin les variations analogiques. Ces divers sujets passent si insensiblement les uns dans les autres que leur distinction est souvent arbitraire.
Je commencerai par l’examen de cette puissance coordinatrice et réparatrice qui, à des degrés différents, est commune à tous les êtres organisés, et que les physiologistes avaient autrefois appelée le nisus formativus.
Blumenbach et d’autres[1] ont soutenu que le principe en vertu duquel l’hydre coupée en morceaux peut se reconstituer en deux ou plusieurs animaux complets, est le même que celui qui fait qu’une lésion d’un animal supérieur peut se guérir par cicatrisation. Les cas comme celui de l’Hydre sont évidemment analogues à la division spontanée ou la génération fissipare des animaux les plus inférieurs et au bourgeonnement des plantes. Entre ces cas extrêmes et celui d’une simple cicatrice, nous pouvons observer toutes les gradations possibles. Spallanzani[2], ayant coupé les pattes et la queue d’une salamandre, obtint six récoltes successives de ces membres dans l’espace de trois mois ; de sorte que l’animal reproduisit pendant