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Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/413

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HYPOTHÈSE PROVISOIRE

peu différente, car nous avons vu au chapitre dix-septième de nombreuses preuves qu’une légère différenciation des éléments sexuels mâles et femelles favorise sensiblement leur union et leur développement subséquent. Mais nous ne saurions faire aucune conjecture sur ce qui peut déterminer le développement des gemmules dans la cellule primordiale de l’ovule non fécondé.

Il faut aussi admettre que l’analogie nous fait défaut pour la détermination de plusieurs autres points : par exemple, si les cellules dérivées d’une même cellule parente peuvent, dans le cours normal de croissance, se développer suivant des conformations différentes, en absorbant diverses sortes de nourriture, indépendamment de leur union avec des gemmules distinctes. Cette difficulté est grande si nous songeons aux productions compliquées et pourtant symétriques, auxquelles les cellules de plantes inoculées du venin d’insectes des galles peuvent donner naissance. On admet assez[1] généralement que diverses excroissances et tumeurs polypoïdes des animaux, sont le produit direct, par prolifération, de cellules normales qui sont devenues anormales. Pendant la croissance et la réparation des os, les tissus parcourent, selon Virchow[2], toute une série de permutations et de substitutions. Les cellules du cartilage peuvent être converties par une transformation directe en cellules de la moelle, ou se transformer en tissu osseux et ensuite en tissu médullaire, ou enfin, elles peuvent se convertir d’abord en moelle, puis en os ; tant les permutations de ces tissus si voisins entre eux, et cependant si distincts par leur apparence, peuvent être variables. Mais comme ces tissus peuvent aussi changer de nature à tout âge, sans changement apparent dans leur nutrition, nous devons, conformément à notre hypothèse, supposer que des gemmules dérivées d’une espèce de tissu, se combinent avec les cellules d’une autre espèce, et causent ainsi les modifications successives.

Il est inutile de spéculer sur l’époque du développement à laquelle chaque unité organique émet ses gemmules, car le sujet tout entier du développement des divers tissus élémentaires est encore très-obscur. Quelques physiologistes, par

  1. Virchow, O. C., 1860, p. 60. 162, 245, 441, 454.
  2. Id. p. 412–426.