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xvi Notice Historique.  

ce sont là les adaptations du théologien naturel. » L’auteur paraît croire que l’organisation progresse par soubresauts, mais que les effets produits par les conditions d’existence sont graduels. Il soutient avec assez de force, en se basant sur des raisons générales, que les espèces ne sont pas des productions immuables. Mais je ne vois pas comment les deux « impulsions » supposées peuvent expliquer scientifiquement les nombreuses et admirables coadaptations que l’on remarque dans la nature ; comment, par exemple, nous pouvons ainsi nous rendre compte de la marche qu’a dû suivre le pic pour s’adapter à ses habitudes particulières. Le style brillant et énergique de ce livre, quoique présentant dans les premières éditions peu de connaissances exactes et une grande absence de prudence scientifique, lui assura aussitôt un grand succès ; et, à mon avis, il a rendu service en appelant l’attention sur le sujet, en combattant les préjugés et en préparant les esprits à l’adoption d’idées analogues.

En 1846, le vétéran de la zoologie, M. J. d’Omalius d’Halloy, a publié (Bull. de l’Acad. roy. de Bruxelles, vol. XIII, p.581) un mémoire excellent, bien que court, dans lequel il émet l’opinion qu’il est plus probable que les espèces nouvelles ont été produites par descendance avec modifications plutôt que créées séparément ; l’auteur avait déjà exprimé cette opinion en 1831.

Dans son ouvrage Nature of Limbs, p. 86, le professeur Owen écrivait en 1849 : « L’idée archétype s’est manifestée dans la chair sur notre planète, avec des modifications diverses, longtemps avant l’existence des espèces animales qui en sont actuellement l’expression. Mais jusqu’à présent nous ignorons entièrement à quelles lois naturelles ou à quelles causes secondaires la succession régulière et la progression de ces phénomènes organiques ont pu être soumises. » Dans son discours à l’Association britannique, en 1858, il parle (p. 51) de « l’axiome de la puissance créatrice continue, ou de la destinée préordonnée des choses vivantes. » Plus loin (p. 90), à propos de la distribution géographique, il ajoute : « Ces phénomènes ébranlent la croyance où nous étions que l’aptéryx de la Nouvelle-Zélande et le coq de bruyère rouge de l’Angleterre aient été des créations distinctes faites dans une île et pour elle. Il est utile, d’ailleurs de se rappeler toujours aussi que le zoologiste attribue le mot de création