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158 Lois de la variation.  

fréquemment des différences. On pourrait penser que le développement des pétales périphériques, en enlevant la nourriture aux organes reproducteurs, détermine leur atrophie ; mais ce ne peut être, en tout cas, la cause unique ; car, chez quelques composées, les graines des fleurettes internes et externes diffèrent sans qu’il y ait aucune différence dans les corolles. Il se peut que ces différences soient en rapport avec un flux de nourriture différent pour les deux catégories de fleurettes ; nous savons, tout au moins, que, chez les fleurs irrégulières, celles qui sont le plus rapprochées de l’axe se montrent les plus sujettes à la pélorie, c’est-à-dire à devenir symétriques de façon anormale. J’ajouterai comme exemple de ce fait et comme cas de corrélation remarquable que, chez beaucoup de pélargoniums, les deux pétales supérieurs de la fleur centrale de la touffe perdent souvent leurs taches de couleur plus foncée ; cette disposition est accompagnée de l’atrophie complète du nectaire adhérent, et la fleur centrale devient ainsi pélorique ou régulière. Lorsqu’un des deux pétales supérieurs est seul décoloré, le nectaire n’est pas tout à fait atrophié, il est seulement très raccourci.

Quant au développement de la corolle, il est très probable, comme le dit Sprengel, que les fleurettes périphériques servent à attirer les insectes, dont le concours est très utile ou même nécessaire à la fécondation de la plante ; s’il en est ainsi, la sélection naturelle a pu entrer en jeu. Mais il paraît impossible, en ce qui concerne les graines, que leurs différences de formes, qui ne sont pas toujours en corrélation avec certaines différences de la corolle, puissent leur être avantageuses ; cependant, chez les Ombellifères, ces différences semblent si importantes — les graines étant quelquefois orthospermes dans les fleurs extérieures et cœlospermes dans les fleurs centrales — que de Candolle l’aîné a basé sur ces caractères les principales divisions de l’ordre. Ainsi, des modifications de structure, ayant une haute importance aux yeux des classificateurs, peuvent être dues entièrement aux lois de la variation et de la corrélation, sans avoir, autant du moins que nous pouvons en juger, aucune utilité pour l’espèce.

Nous pouvons quelquefois attribuer à tort à la variation corrélative des conformations communes à des groupes entiers d’espèces, qui ne sont, en fait, que le résultat de l’hérédité. Un an-