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Page:Darwin - L’Origine des espèces (1906).djvu/211

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  Origine et transitions des êtres organisés. 193

tudes différentes de celles propres à leur espèce et aux autres espèces du même genre, il semblerait que ces individus dussent accidentellement devenir le point de départ de nouvelles espèces, ayant des habitudes anormales, et dont la conformation s’écarterait plus ou moins de celle de la souche type. La nature offre des cas semblables. Peut-on citer un cas plus frappant d’adaptation que celui de la conformation du pic pour grimper aux troncs d’arbres, et pour saisir les insectes dans les fentes de l’écorce ? Il y a cependant dans l’Amérique septentrionale des pics qui se nourrissent presque exclusivement de fruits, et d’autres qui, grâce à leurs ailes allongées, peuvent chasser les insectes au vol. Dans les plaines de la Plata, où il ne pousse pas un seul arbre, on trouve une espèce de pic (Colaptes campestris) ayant deux doigts en avant et deux en arrière, la langue longue et effilée, les plumes caudales pointues, assez rigides pour soutenir l’oiseau dans la position verticale, mais pas tout à fait aussi rigides qu’elles le sont chez les vrais pics, et un fort bec droit, qui n’est pas toutefois aussi droit et aussi fort que celui des vrais pics, mais qui est cependant assez solide pour percer le bois. Ce Colaptes est donc bien un pic par toutes les parties essentielles de sa conformation. Les caractères même insignifiants, tels que la coloration, le son rauque de la voix, le vol ondulé, démontrent clairement sa proche parenté avec notre pic commun ; cependant, je puis affirmer, d’après mes propres observations, que confirment d’ailleurs celles d’Azara, observateur si soigneux et si exact, que, dans certains districts considérables, ce Colaptes ne grimpe pas aux arbres et qu’il fait son nid dans des trous qu’il creuse dans la terre ! Toutefois, comme l’a constaté M. Hudson, ce même pic, dans certains autres districts, fréquente les arbres et creuse des trous dans le tronc pour y faire son nid. Comme autre exemple des habitudes variées de ce genre, je puis ajouter que de Saussure a décrit un Colaptes du Mexique qui creuse des trous dans du bois dur pour y déposer une provision de glands.

Le pétrel est un des oiseaux de mer les plus aériens que l’on connaisse ; cependant, dans les baies tranquilles de la Terre de Feu, on pourrait certainement prendre le Puffinuria Berardi pour un grèbe ou un pingouin, à voir ses habitudes générales, sa facilité extraordinaire pour plonger, sa manière de nager et