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  Difficultés spéciales. 209

déterminer Fritz Müller à adopter les idées que j’ai développées dans le présent ouvrage.

Un autre zoologiste distingué, feu le professeur Claparède, est arrivé au même résultat en raisonnant de la même manière. Il démontre que certains acarides parasites, appartenant à des sous-familles et à des familles distinctes, sont pourvus d’organes qui leur servent à se cramponner aux poils. Ces organes ont dû se développer d’une manière indépendante et ne peuvent avoir été transmis par un ancêtre commun ; dans les divers groupes, ces organes sont formés par une modification des pattes antérieures, des pattes postérieures, des mandibules ou lèvres, et des appendices de la face inférieure de la partie postérieure du corps.

Dans les différents exemples que nous venons de discuter, nous avons vu que, chez des êtres plus ou moins éloignés les uns des autres, un même but est atteint et une même fonction accomplie par des organes assez semblable en apparence, mais qui ne le sont pas en réalité. D’autre part, il est de règle générale dans la nature qu’un même but soit atteint par les moyens les plus divers, même chez des êtres ayant entre eux d’étroites affinités. Quelle différence de construction n’y a-t-il pas, en effet, entre l’aile emplumée d’un oiseau et l’aile membraneuse de la chauve-souris ; et, plus encore, entre les quatre ailes d’un papillon, les deux ailes de la mouche et les deux ailes et les deux élytres d’un coléoptère ? Les coquilles bivalves sont construites pour s’ouvrir et se fermer, mais quelle variété de modèles ne remarque-t-on pas dans la conformation de la charnière, depuis la longue série de dents qui s’emboîtent régulièrement les unes dans les autres chez la nucule, jusqu’au simple ligament de la moule ? La dissémination des graines des végétaux est favorisée par leur petitesse, par la conversion de leurs capsules en une enveloppe légère sous forme de ballon, par leur situation au centre d’une pulpe charnue composée des parties les plus diverses, rendue nutritive, revêtue de couleurs voyantes de façon à attirer l’attention des oiseaux qui les dévorent, par la présence de crochets, de grappins de toutes sortes, de barbes dentelées, au moyen desquels elles adhèrent aux poils des animaux ; par l’existence d’ailerons et d’aigrettes aussi variés par la forme qu’élégants par la structure, qui en font les jouets du