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  Objections diverses. 261

minal du membre se meut de façon à s’appliquer soit contre le sommet carré et large de l’avant-dernier segment, soit contre un côté tout entier ; ce membre peut ainsi servir à saisir un objet, tout en servant toujours d’organe locomoteur. Nous trouvons ensuite qu’un coin de l’avant-dernier segment se termine par une légère proéminence pourvue quelquefois de dents irrégulières, contre lesquelles le dernier segment vient s’appliquer. La grosseur de cette projection venant à augmenter et sa forme, ainsi que celle du segment terminal, se modifiant et s’améliorant légèrement, les pinces deviennent de plus en plus parfaites jusqu’à former un instrument aussi efficace que les pattes-mâchoires des homards. On peut parfaitement observer toutes ces gradations.

Les polyzoaires possèdent, outre l’aviculaire, des organes curieux nommés vibracula. Ils consistent généralement en de longues soies capables de mouvement et facilement excitables. Chez une espèce que j’ai examinée, les cils vibratiles étaient légèrement courbés et dentelés le long du bord extérieur ; tous ceux du même polyzoaire se mouvaient souvent simultanément, de telle sorte qu’agissant comme de longues rames, ils font passer rapidement une branche sur le porte-objet de mon microscope. Si l’on place une branche sur ce bord extérieur des polyzoaires, les cils vibratiles se mêlent et ils font de violents efforts pour se dégager. On croit qu’ils servent de moyen de défense à l’animal, et, d’après les observations de M. Busk, « ils balayent lentement et doucement la surface du polypier, pour éloigner ce qui pourrait nuire aux habitants délicats des cellules lorsqu’ils sortent leurs tentacules. » Les aviculaires servent probablement aussi de moyen défensif ; en outre, ils saisissent et tuent des petits animaux que l’on croit être ensuite entraînés par les courants à portée des tentacules des zooïdes. Quelques espèces sont pourvues d’aviculaires et de cils vibratiles ; il en est qui n’ont que les premiers ; d’autres, mais en petit nombre, ne possèdent que les cils vibratiles seuls.

Il est difficile d’imaginer deux objets plus différents en apparence qu’un cil vibratile ou faisceau de soies et qu’un aviculaire, ressemblant à une tête d’oiseau ; ils sont cependant presque certainement homologues et proviennent d’une source commune, un