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  races du pigeon domestique. 23

exacte avec la longueur du bec ; le développement du jabot et de la partie supérieure de l’œsophage ; le développement ou l’atrophie de la glande oléifère ; le nombre des plumes primaires de l’aile et de la queue ; la longueur relative des ailes et de la queue, soit entre elles, soit par rapport au corps ; la longueur relative des pattes et des pieds ; le nombre des écailles des doigts ; le développement de la membrane interdigitale, sont autant de parties essentiellement variables. L’époque à laquelle les jeunes acquièrent leur plumage parfait, ainsi que la nature du duvet dont les pigeonneaux sont revêtus à leur éclosion, varient aussi ; il en est de même de la forme et de la grosseur des œufs. Le vol et, chez certaines races, la voix et les instincts, présentent des diversités remarquables. Enfin, chez certaines variétés, les mâles et les femelles en sont arrivés à différer quelque peu les uns des autres.

On pourrait aisément rassembler une vingtaine de pigeons tels que, si on les montrait à un ornithologiste, et qu’on les lui donnât pour des oiseaux sauvages, il les classerait certainement comme autant d’espèces bien distinctes. Je ne crois même pas qu’aucun ornithologiste consentît à placer dans un même genre le Messager anglais, le Culbutant courte-face, le Runt, le Barbe, le Grosse-gorge et le Paon ; il le ferait d’autant moins qu’on pourrait lui montrer, pour chacune de ces races, plusieurs sous-variétés de descendance pure, c’est-à-dire d’espèces, comme il les appellerait certainement.

Quelque considérable que soit la différence qu’on observe entre les diverses races de pigeons, je me range pleinement à l’opinion commune des naturalistes qui les font toutes descendre du Biset (Columba livia), en comprenant sous ce terme plusieurs races géographiques, ou sous-espèces, qui ne diffèrent les unes des autres que par des points insignifiants. J’exposerai succinctement plusieurs des raisons qui m’ont conduit à adopter cette opinion, car elles sont, dans une certaine mesure, applicables à d’autres cas. Si nos diverses races de pigeons ne sont pas des variétés, si, en un mot, elles ne descendent pas du Biset, elles doivent descendre de sept ou huit types originels au moins, car il serait impossible de produire nos races domestiques actuelles par les croisements réciproques d’un nombre moindre. Comment, par exemple, pro-