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conformation ; ou bien il apporte plus de soins qu’on ne le fait d’ordinaire pour apparier ensemble ses plus beaux sujets ; ce faisant, il les améliore, et ces animaux perfectionnés se répandent lentement dans le voisinage. Ils n’ont pas encore un nom particulier ; peu appréciés, leur histoire est négligée. Mais, si l’on continue à suivre ce procédé lent et graduel, et que, par conséquent, ces animaux s’améliorent de plus en plus, ils se répandent davantage, et on finit par les reconnaître pour une race distincte ayant quelque valeur ; ils reçoivent alors un nom, probablement un nom de province. Dans les pays à demi civilisés, où les communications sont difficiles, une nouvelle race ne se répand que bien lentement. Les principaux caractères de la nouvelle race étant reconnus et appréciés à leur juste valeur, le principe de la sélection inconsciente, comme je l’ai appelée, aura toujours pour effet d’augmenter les traits caractéristiques de la race, quels qu’ils puissent être d’ailleurs, — sans doute à une époque plus particulièrement qu’à une autre, selon que la race nouvelle est ou non à la mode, — plus particulièrement aussi dans un pays que dans un autre, selon que les habitants sont plus ou moins civilisés. Mais, en tout cas, il est très peu probable que l’on conserve l’historique de changements si lents et si insensibles.

CIRCONSTANCES FAVORABLES À LA SÉLECTION OPÉRÉE PAR L’HOMME.

Il convient maintenant d’indiquer en quelques mots les circonstances qui facilitent ou qui contrarient l’exercice de la sélection par l’homme. Une grande faculté de variabilité est évidemment favorable, car elle fournit tous les matériaux sur lesquels repose la sélection ; toutefois, de simples différences individuelles sont plus que suffisantes pour permettre, à condition que l’on y apporte beaucoup de soins, l’accumulation d’une grande somme de modifications dans presque toutes les directions. Toutefois, comme des variations manifestement utiles ou agréables à l’homme ne se produisent qu’accidentellement, on a d’autant plus de chance qu’elles se produisent, qu’on élève un plus grand nombre d’individus. Le nombre est, par conséquent, un des grands éléments de succès. C’est en partant de ce principe que Marshall a fait remar-