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dans l’année deux fois plus de femmes mariées au-dessous de vingt ans que de femmes célibataires. » La mortalité des maris au-dessous de vingt ans est aussi considérable[1], mais la cause de ce fait paraît douteuse. Enfin, si les hommes qui retardent prudemment le mariage jusqu’à ce qu’ils puissent élever convenablement leur famille, choisissaient, comme ils le font souvent, des femmes dans la fleur de l’âge, la proportion d’accroissement dans la classe élevée ne serait que légèrement diminuée.

Un ensemble énorme de documents statistiques, relevés en France en 1853, ont permis de démontrer que, dans ce pays, les célibataires, compris entre vingt et quatre-vingts ans, sont sujets à une mortalité beaucoup plus considérable que les hommes mariés ; par exemple, la proportion des célibataires mourant entre vingt et trente ans était annuellement de 11,3 sur 1,000 ; la mortalité n’étant chez les hommes mariés que de 6,5 sur 1,000[2]. La même loi s’est appliquée en Écosse pendant les années 1863 et 1864 pour toute la population au-dessus de vingt ans. Ainsi, la mortalité des célibataires entre vingt et trente ans a été annuellement de 14,97 sur 1,000, tandis qu’elle ne s’est trouvée chez les hommes mariés que de 7,24 sur 1,000, soit moins de la moitié[3]. Le docteur Stark remarque à ce sujet : « Le célibat est plus préjudiciable à la vie que les métiers les plus malsains, ou qu’une résidence dans une maison ou dans un district insalubre où on n’aurait jamais fait la moindre tentative d’assainissement. » Il considère que la diminution de la mortalité est le résultat direct du « mariage et des habitudes domestiques plus régulières qui accompagnent cet état. » Il admet, toutefois, que les hommes intempérants, dissolus et criminels, qui vivent peu longtemps, ne se marient ordinairement pas ; il faut également admettre que les hommes à constitution faible, à mauvaise santé, ou ayant une infirmité grave de corps ou d’esprit, ne cherchent guère à se marier ou n’y réussissent pas. Le docteur Stark paraît conclure que le mariage est, en lui-même, une cause de longévité ; cette conclusion résulte de ce que les hommes mariés âgés ont un avantage marqué sur les célibataires aussi âgés ; mais chacun a connu des jeunes gens à la constitution faible qui ne se sont pas mariés, et qui

  1. Ces citations sont empruntées à notre plus haute autorité sur ces questions, le travail du Dr Farr, sur l’Influence du mariage sur la mortalité du peuple français, lu devant la National Association for the Promotion of Social Science, 1858.
  2. Dr Farr, ibid. Les citations suivantes sont toutes tirées du même travail.
  3. J’ai pris la moyenne des moyennes quinquennales données dans le Dixième rapport annuel des naissances, décès, etc., en Écosse, pour 1867. La citation du Dr Stark est tirée d’un article du Daily News, du 17 oct. 1868, que le Dr Farr considère comme très complet.