Page:Darwin - La Descendance de l’homme, 1881.djvu/428

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


CHAPITRE XIII


CARACTÈRES SEXUELS SECONDAIRES DES OISEAUX


Différences, sexuelles. — Loi du combat. — Armes spéciales. — Organes vocaux. — Musique instrumentale. — Démonstrations amoureuses et danses. — Ornements permanents ou temporaires. — Mues annuelles, simples et doubles. — Les mâles aiment à faire étalage de leurs ornements.


Les caractères sexuels secondaires sont plus variés et plus remarquables chez les oiseaux que chez tous les autres animaux ; ils n’occasionnent peut-être pas cependant plus de modifications de structure chez les uns que chez les autres. Je m’étendrai donc très-longuement sur ce sujet. Les oiseaux mâles possèdent parfois, rarement il est vrai, des armes particulières qui leur permettent de lutter les uns contre les autres. Ils charment les femelles par une musique vocale ou instrumentale extrêmement variée. Ils sont ornés de toutes sortes de crêtes, de caroncules, de protubérances, de cornes, de sacs à air, de houppes, de plumeaux, et de longues plumes, qui s’élancent gracieusement de toutes les parties du corps. Le bec, les parties nues de la peau de la tête et les plumes présentent souvent les couleurs les plus admirables. Les mâles font une cour assidue aux femelles ; ils dansent, ou exécutent des mouvements bizarres et fantastiques sur le sol ou dans l’air. Dans un cas au moins, le mâle émet une odeur musquée qui sert, sans doute, à séduire ou à exciter la femelle, car un excellent observateur, M. Ramsay[1], dit en parlant du canard musqué australien (Biziura lobata) que « l’odeur que le mâle émet pendant l’été appartient en propre à ce sexe et persiste même toute l’année chez quelques individus ; mais jamais, même pendant la saison des amours, je n’ai tué une seule femelle sentant le musc. » Pendant la saison des amours cette odeur est si forte qu’on la sent bien longtemps avant de voir l’oiseau[2], En résumé, les oiseaux paraissent être de tous les animaux, l’homme excepté, ceux qui ont le sentiment esthétique le plus développé, et ils ont, pour le beau, à peu près le même goût que nous. Il suffit pour le démontrer de rappeler le plaisir que nous avons à entendre leurs chants, et la joie qu’éprouvent les femmes civilisées, aussi bien que les femmes sauvages, à se couvrir la tête de plumes qui leur sont empruntées, et à porter des pierreries qui

  1. Ibis, vol. III (nouvelle série), 1867, p. 414.
  2. Gould. Handbook to the Birds of Australia, 1865, vol. II, p. 383.