Page:Darwin - La Descendance de l’homme, 1881.djvu/548

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sorte que leurs huppes sont réellement plus longues, mais plus étroites que chez le mâle adulte[1].

Lorsque les jeunes et les femelles se ressemblent étroitement et diffèrent tous deux du mâle, il est tout naturel de conclure que le mâle seul a été modifié. Dans des cas anormaux même de l’Heliothrix et du Mergus, il est probable que les mâles et les femelles adultes de la première espèce étaient primitivement pourvus d’une queue allongée, et, ceux de la seconde, d’une huppe également grande, caractères que quelque cause inconnue a fait partiellement perdre aux mâles adultes, et qu’ils transmettent, dans leur état amoindri, à leur descendance mâle seule, lorsqu’elle atteint l’âge adulte correspondant. M. Blyth[2] cite quelques faits remarquables relatifs aux espèces alliées qui se représentent les unes les autres dans des pays différents ; ces faits viennent à l’appui de l’hypothèse que, dans la catégorie qui nous occupe, le mâle seul a été modifié quand il s’agit toutefois des différences qu’on observe entre lui, la femelle et les jeunes. En effet, les mâles adultes de plusieurs de ces espèces représentatives ont éprouvé quelques modifications, ce qui permet de distinguer l’un de l’autre les mâles appartenant à deux de ces espèces, tandis que les femelles et les jeunes restent absolument semblables ; il est donc évident que ces derniers n’ont subi aucune modification. On peut observer ces faits chez quelques traquets indiens (Thamnobia), chez quelques Nectarinidés (Nectarinia), chez les pies-grièches (Tephrodornis), chez certains martins-pêcheurs (Tanysiptera), chez les faisans Kallij (Gallophasis) et chez les perdrix des arbres (Arboricola).

Les oiseaux qui revêtent un plumage distinct pendant l’été et pendant l’hiver à peu près semblable chez les mâles et les femelles nous fournissent un exemple analogue ; on peut facilement, en effet, distinguer les unes des autres certaines espèces très-voisines, alors qu’elles portent leur plumage nuptial ou plumage d’été, mais il est impossible de les reconnaître quand elles revêtent leur plumage d’hiver, ou qu’elles portent leur premier plumage. On pourrait citer comme exemple quelques hoche-queues indiennes (Motacilla) très-voisines. M. Swinhoe[3] affirme que trois espèces de Ardeola, genre de hérons, qui se représentent sur des continents séparés,

  1. Macgillivray, Hist. Brit. Birds, V, p.207-214.
  2. Voir son remarquable travail dans Journal of the Asiatic Soc. of Bengal, XIX, 1850, p. 223 : Jerdon, Birds of India, I, Introduction, p. xxix. Quant au Tanysiptera, M. Blyth tient du prof. Schlegel qu’on peut y distinguer plusieurs races, simplement en comparant les mâles adultes.
  3. Swinhoe, Ibis, July 1863, p. 131 ; et un article antérieur contenant un extrait d’une note de M. Blyth, dans Ibis, January 1861, p. 52.