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des mâles[1], » — il n’est pas improbable qu’elles aient été ainsi amenées à rechercher les mâles, au lieu d’être courtisées par eux. Ce fait se présente d’ailleurs, dans une certaine mesure, chez quelques espèces ; chez les paonnes, chez les dindes sauvages et chez quelques tétras, par exemple. Si nous en jugeons par les mœurs de la plupart des oiseaux mâles, la taille plus considérable, la force et le caractère extraordinairement belliqueux des Émeus et des turnix femelles doivent signifier qu’elles cherchent à se débarrasser de leurs rivales pour s’assurer la possession des mâles. Cette hypothèse explique tous les faits, car les mâles se laissent probablement séduire par les femelles, qui ont, par leur coloration plus vive, par leurs autres ornements, et par leurs facultés vocales, plus d’attraits pour eux. La sélection sexuelle, entrant alors enjeu, tendrait constamment à augmenter ces attraits chez les femelles, tandis que les mâles et les jeunes subiraient peu, ou pas, de modifications.

Catégorie III. Lorsque le mâle adulte ressemble à la femelle adulte, les jeunes des deux sexes ont un premier plumage qui leur est propre. — Dans cette classe, les deux sexes adultes se ressemblent et diffèrent des jeunes. On peut observer ce fait chez beaucoup d’oiseaux divers. Le rouge-gorge mâle se distingue à peine de la femelle ; mais les jeunes, avec leur plumage pommelé olive obscur et brun, ressemblent très-peu à leurs parents. Le mâle et la femelle du magnifique ibis écarlate se ressemblent, tandis que les petits sont bruns ; et la couleur écarlate, bien que commune aux deux sexes, est apparemment un caractère sexuel, car elle ne se développe qu’imparfaitement chez les oiseaux en captivité, comme cela arrive fréquemment aussi aux mâles d’autres espèces très-brillamment colorés. Chez beaucoup d’espèces de hérons, les jeunes diffèrent beaucoup des adultes, dont le plumage d’été, bien que commun aux deux sexes, a un caractère nuptial évident. Les jeunes cygnes sont ardoisés, tandis que les adultes sont blanc pur. Il y a une foule d’autres cas qu’il serait superflu d’énumérer ici. Ces différences entre les jeunes et les adultes dépendent, selon toute apparence, comme dans les deux autres classes, de ce que les jeunes ont conservé un état de plumage antérieur et ancien que les adultes des deux sexes ont échangé contre un nouveau. Lorsque les adultes affectent de vives couleurs, nous pouvons conclure, des remarques faites au sujet de l’ibis écarlate et de beaucoup de hérons, ainsi que de l’analogie avec les espèces de la première classe, que les mâles presque adultes ont acquis ces couleurs sous l’in-

  1. Jerdon, Birds of India, vol. III, p. 598.