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les mêmes termes et la même classification, comme l’a prouvé Isid. Geoffroy Saint-Hilaire[1]. Dans mon ouvrage sur la Variation des animaux domestiques, j’ai cherché à grouper d’une manière approximative les lois de la variation ainsi que suit : — l’action directe et définie des changements de conditions, presque prouvée par le fait que tous les individus appartenant à une même espèce varient de la même manière dans les mêmes circonstances ; les effets de la continuité de l’usage ou du défaut d’usage des parties ; la cohésion des parties homologues ; la variabilité des parties multiples ; la compensation de croissance, loi dont, cependant, l’homme ne m’a encore fourni aucun exemple parfait ; les effets de la pression mécanique d’une partie sur une autre, comme celle du bassin sur le crâne de l’enfant dans l’utérus ; les arrêts de développement, déterminant la diminution ou la suppression de parties ; la réapparition par retour de caractères perdus depuis longtemps ; enfin la corrélation des variations. Toutes ces lois, si on peut employer ce mot, s’appliquent également à l’homme et aux animaux, et même pour la plupart aux plantes. Il serait superflu de les discuter toutes ici[2] ; mais plusieurs ont pour nous une telle importance que nous aurons à les traiter avec quelque développement.


Action directe et définie des changements dans les conditions. — Sujet fort embarrassant. On ne saurait nier que le changement des conditions produise des effets souvent considérables sur les organismes de tous genres ; il paraît même probable, au premier abord, que ce résultat serait invariable si le temps nécessaire pour qu’il puisse s’effectuer s’était écoulé. Mais je n’ai pas pu obtenir des preuves absolues en faveur de cette conclusion, à laquelle on peut opposer des arguments valables, en ce qui concerne au moins les innombrables structures adaptées à un but spécial. On ne peut, cependant, douter que le changement des conditions ne provoque une étendue presque indéfinie de fluctuations variables, qui, jusqu’à un certain point, rendent plastique l’ensemble de l’organisation.

On a mesuré, aux États-Unis, plus d’un million de soldats qui ont servi dans la dernière guerre, en ayant soin d’indiquer les États dans lesquels ils étaient nés et ceux dans lesquels ils avaient été

  1. Hist. gén. et part. des anomalies de l’organisation, vol. I, 1832.
  2. J’ai discuté ces lois en détail dans la Variation des animaux et des plantes, etc., vol. II, chap. xxii et xxiii. M. J. Durand vient (1868) de publier un mémoire remarquable : De l’Influence des milieux, etc. Il insiste beaucoup sur l’importance de la nature du sol quand il s’agit des plantes.